Arrivé en 2005 en tant que directeur administratif et financier d'une PME de 60 millions d'euros de chiffre d'affaires, Jérôme Thill est aujourd'hui directeur général d'un groupe fort de 4500 collaborateurs et pesant 600 millions d'euros. Retour sur l'itinéraire d'un financier aux fortes ambitions pour Cerba.

Sa victoire dans la catégorie pharma-santé-agroalimentaire aux Trophées Leaders de la Finance n’a pas laissé indifférents ses collaborateurs : « Jérôme est un dirigeant qui n’oublie jamais qu’il est entouré de ses équipes », confie l’une de ses proches collaboratrices. Et de renchérir : «  Il possède de réelles qualités humaines qui font qu’il est un leader  apprécié de ses collaborateurs. »
Arrivé en 2005 en tant que directeur administratif et financier d’une entité qui atteint alors 60 millions d’euros de chiffre d’affaires, il en est depuis 2010 le directeur général. En plus des finances, du juridique et des relations avec les actionnaires, il est également aujourd’hui à la tête des achats, de la DSI, du secrétariat général et du M&A international. Le Groupe pèse aujourd’hui 600 millions d’euros de chiffre d’affaires et compte 4 500 collaborateurs.
Son parcours avant 2005 n’est pas commun. Passé de Lafarge à Barclays, il évolue ensuite dans la restructuration financière et intègre une entreprise en difficulté. C’est ainsi qu’il crée le management de transition en direction financière. Il travaillera six années pour le compte de fonds d’investissement et recrutera lui-même une vingtaine de DAF avant d’intégrer Cerba.

 

Décideurs. Cerba est sous LBO depuis dix-sept ans. Qu’est-ce que cela implique pour votre direction financière ? Comment envisagez-vous l’avenir de Cerba ?

Jérôme Thill. Dans ce contexte de LBO, la direction financière joue un rôle important dans l’organisation globale, en particulier pour fournir une information financière fiable, prospective et très détaillée et assurer une communication étroite avec les actionnaires. Nous avons été amenés à développer un schéma de gestion des risques et une politique de contrôle interne pointus avec la mise en place de référentiels par fonction et un programme d’audit périodique de ces référentiels et processus. Tout actionnaire a des avantages et des inconvénients. J’ai eu la chance de rencontrer des fonds d’investissement très compétents, qui ont apporté un éclairage précieux à notre société. Nous avons toujours eu des échanges directs et transparents et sommes conscients que Cerba ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui s’ils n’avaient pas été là. Depuis 1998, nos actionnaires financiers ont soutenu notre croissance externe avec plus de 300 millions d’euros de fonds propres investis depuis dix ans.
Nous avons d’ailleurs des ambitions fortes pour l’avenir et nous avons la capacité à doubler de taille dans les cinq prochaines années, à nous diversifier et à nous internationaliser. Nous étions jusqu’ici essentiellement actifs en France, en Belgique et au Luxembourg. Nous venons d’acquérir un groupe de laboratoires à Dubai. L’Afrique représente, par ailleurs, un vrai potentiel de développement pour Cerba. Nous apportons une expertise et un accompagnement médical et nous avons une place à prendre dans la création de réseaux de biologie locaux de qualité.
 

L’efficience économique n’est pas une fin en soi, mais un impératif pour développer l’entreprise

 

Décideurs. Quelles sont les spécificités de la direction financière de Cerba ? Comment travaillez-vous ?

J. T. Compte tenu de l’intense activité de « build-up » que nous menons depuis dix ans, la direction financière a dû constamment s’adapter pour intégrer instantanément des structures de taille et de maturité très différentes. Nous avons donc privilégié une organisation semi-décentralisée, avec des fonctions centrales fortes en expertise et des responsables administratifs et comptables en région pour assurer l’intégration rapide et efficiente des comptabilités des laboratoires acquis.
Notre direction financière se renouvelle en permanence. Elle se veut proche des laboratoires et ne s’enferme pas dans une tour d’ivoire. Je veille à ce que nous ne soyons pas en inertie. Nous sommes de plus en plus nomades et agiles. Nous avons la responsabilité d’anticiper dans un secteur assez conservateur. Nous devons en permanence être à l’écoute, non seulement de la concurrence internationale, mais également des équipes pour sécuriser les résultats et les relations investisseurs. L’efficience économique n’est pas une fin en soi, mais un impératif pour garder notre indépendance et assurer le développement du Groupe.

 

Décideurs. Quelle est votre principale fierté ?

J. T. Plutôt que de fierté, je parlerais de volonté. J’en ai eu d’avoir constitué une équipe et donné à une communauté la possibilité de s’épanouir dans un projet professionnel cohérent et dans un secteur moteur de l’économie et porteur de sens. Cerba a par exemple été le premier laboratoire en Europe à proposer son propre test diagnostic non invasif de la trisomie 21.
Je suis néanmoins fier de notre culture d’entreprise. Nous mettons un point d’honneur, avec notre présidente Catherine Courboillet,  à insuffler au quotidien un esprit entrepreneurial et une culture de l’autonomie et de la responsabilisation tout en offrant des projets renouvelés et transformants. Il faut éviter l’instauration d’une « technocratie » en entreprise. Cette culture se reflète dans l’actionnariat salarié mis en place : plus de 200 managers et biologistes sont actionnaires. Tous les jeunes cadres entrants peuvent devenir actionnaires de Cerba.
 

Décideurs. En somme, quelles doivent être les qualités d’une bonne direction financière ?

J. T. L’agilité et la remise en question permanente sont fondamentales dans la fonction finance. Sa direction doit être le gardien du temple, certes, mais toujours au service du développement de l’entreprise.

 

Propos recueillis par Charlotte Fabre

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