Après avoir mis en place Hello Bank, la banque en ligne de BNP Paribas, Virginie Fauvel s’est attelée depuis plus de deux ans, en France, à la stratégie digitale d’Allianz, premier assureur mondial de biens. Numérique et pouvoir au féminin : elle est de celles que les transformations inspirent. Rencontre avec Virginie Fauvel, directrice digital & market management et membre du Comité Exécutif d'Allianz France.

Décideurs. Allianz vient de lancer un accélérateur de start-up au sein de son stade Allianz Riviera, pour accompagner les jeunes pousses du digital. En quoi consiste ce projet ?
Virginie Fauvel. Cinq start-up sont sélectionnées sur dossier par un comité d’experts composé de salariés d’Allianz France mais aussi de personnalités issues du secteur du numérique. Pendant cinq mois, elles sont hébergées dans l’Allianz Riviera, notre stade niçois où 550 mètres carrés sont mis à leur disposition. Elles profitent ainsi de l’accompagnement quotidien des équipes de Sylvain Theveniaud, directeur de l’accélérateur, et du mentoring de notre comité exécutif qui leur ouvre son carnet d’adresses. L’estampille Allianz leur apporte également une crédibilité. Dans une logique win-win, le projet permet au groupe de s’inspirer des modes de fonctionnement et des stratégies de ces entreprises pour identifier notamment des pistes de partenariats. En revanche, Allianz accompagne les start-up sans lien capitalistique. L’objectif est de conserver une relation équilibrée avec elles sans les étouffer.

 

Décideurs. L’alliance start-up et grands groupes est définitivement « la » solution pour innover ?

V. F. La proximité à l’égard des start-up est un excellent levier pour construire un écosystème global d’innovation mais elle reste un complément à la dynamique interne de R&D. Il est indispensable de recruter des spécialistes du mobile et de l’expérience utilisateur  et, simultanément, de permettre aux salariés de gagner en confiance et en agilité au contact des nouvelles technologies. Accepter le droit à l’échec et favoriser la « cross-fertilisation » des équipes en mode plateaux sont des règles d’or. L’innovation s’appuie aussi sur des partenariats stratégiques avec les entreprises leader du numérique. Allianz est par exemple l’assureur des conducteurs Uber depuis quelques mois et celui de Drivy, leader du carsharing sur les marchés français, allemand et bientôt espagnol.

 

Décideurs. Comment s’organise la complémentarité de l’innovation interne/externe ?

V. F. Des espaces parisiens situés au milieu de nos équipes internes sont mis à disposition des start-up pour leur permettre de rencontrer leurs partenaires, ce qui facilite les rencontres et les échanges entre les jeunes pousses et les salariés. Nous avons également créé la Digital Academy avec la direction des ressources humaines pour permettre aux salariés de se former au processus de transformation numérique. Comment communiquer sur les réseaux sociaux, comprendre la sharing economy, utiliser les objets connectés… Plusieurs Moocs  (NDLR Cours en ligne ouverts à tous) dédiés sont ouverts à l’ensemble de nos salariés et agents généraux.  Ils ont été vus 35 000 fois en interne et 60% de nos agents ont vu au moins une vidéo. C’est un excellent format pour rendre ludique un sujet qui pouvait être facteur de stress. Les Moocs sont en ligne sur Youtube et accessibles à toute personne voulant se former au numérique.


« Les Moocs rendent ludique la transformation numérique »    


Décideurs. Vous pilotez la stratégie digitale du groupe, quelles sont les particularités d'une telle mission lorsqu'elle s'exerce dans un cadre international ? 

V. F. L’organisation chez Allianz est la même dans tous les pays, le pilotage de la transformation y est donc facilité. Je pars chaque année en Silicon Valley avec mon comité de direction ou d'autres membres d'Allianz rencontrer les start ups et les géants du numérique afin de rester connectée à cet écosystème unique au monde. L'esprit, les méthodes de travail, la technologie sont intéressants pour notre travail au quotidien dans un grand groupe. Une transformation digitale réussie doit être portée par les instances dirigeantes. Autre ressource indispensable, la mobilisation d’un expert du numérique qui pilote la pénétration de la transformation en interne. Aujourd’hui, Allianz est bercée par une culture très forte de l’action et de la réalisation. Le fait que le groupe soit international facilite la cross-fertilisation des idées. C’est d’ailleurs un atout pour les start-up incubées dans l’accélérateur qui se voient ouvrir des marchés partout dans le monde.

 

Décideurs. Votre parcours est un exemple de leadership au féminin, quelles sont les clés de réussite d’une telle trajectoire ?

V. F. Quand on veut porter une transformation numérique, il faut le faire avec habileté mais détermination. Les femmes ont cette capacité à transformer avec tact et constance à la fois. En tant que femme, il est certain que nous devons souvent marquer notre positionnement plus nettement qu’un homme. Il est, par ailleurs, très important d’être attentif à l’image de la femme véhiculée par les campagnes de communication... Plus les femmes seront représentées comme étant libres et charismatiques, plus elles seront tentées de prendre des risques. C’est un combat nécessaire pour changer tant le regard des hommes que des femmes sur le leadership féminin.


Propos recueillis par Alexandra Cauchard @AlexCauchard

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