Le secrétaire général du Comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri) dresse le bilan et les perspectives des interventions de l'institution. 
Au cours des derniers mois, le secrétaire général du Comité interministériel de restructuration industrielle (Ciri) et ses équipes ont accompagné plusieurs societés placées en procédure collective, parmi lesquelles Fagor Brandt. Il revient pour nous sur la manière dont se sont déroulées les négociations avec leurs partenaires économiques et financiers.

Décideurs. Dans quel cadre intervient le Ciri ?
Thomas Revial.
Avant toute chose, il est important de souligner que c’est à l’initiative des entreprises que le Ciri – placé au sein de la direction générale du Trésor – agit : nous sommes au service des entreprises pour les aider à surmonter leurs difficultés. En pratique, nous intervenons pour des entreprises d’une taille importante, employant plus de 400 salariés en France. Cet accompagnement concerne aussi bien des entreprises familiales de taille intermédiaire que des grands groupes cotés. Nous avons pour principale mission de les aider à faire face à leurs difficultés économiques qui appellent généralement une restructuration financière et industrielle afin d’assurer leur viabilité dans le temps. Nous analysons leur situation sous tous les angles, stratégique, financier et industriel. Nous cherchons à comprendre leur positionnement sur leur marché et leur modèle économique pour évaluer leur capacité de rebond et les restructurations nécessaires à mener, notamment sur le plan financier et bilanciel.

Décideurs. Comment l’action du Ciri a-t-elle évolué au cours de ces dernières années ?
T.?R.
En raison du nombre d’entreprises de taille importante ayant fait l’objet d’une ouverture de procédure collective, le gouvernement a souhaité en 2013 renforcer les moyens du Ciri et étendre temporairement son action en faveur des entreprises se trouvant en phase judiciaire pour faciliter et accompagner leur reprise. En temps normal, nous intervenons en phase amiable, où il existe un espace de discussion et de négociation réel qui justifie tout à fait l’implication du Ciri comme médiateur entre les parties pour parvenir à un accord. Dans le cadre d’une procédure collective, c’est le tribunal qui mène le processus et joue un rôle central, avec l’administrateur judiciaire, dans la construction d’une solution entre les différentes parties prenantes. Cette action complémentaire du Ciri a permis d’accompagner plusieurs sociétés placées en procédure collective dans le cadre de projets de reprise. C’est ainsi que nous avons suivi sur le plan administratif et financier Fagor Brandt, spécialiste de l’électroménager, dans le cadre de sa reprise par le groupe algérien Cevital.

Décideurs. Quel bilan faites-vous de votre activité en 2014 ? Comment se répartissent sur le plan sectoriel les dossiers que vous recevez ?
T.?R.
L’année 2014 et le premier trimestre 2015 ont vu une amorce de normalisation du nombre de dossiers traités, eu égard notamment aux chiffres «?historiques?» des années 2009-2010 et 2013. Nous avons reçu une trentaine de nouveaux dossiers en 2014, contre une quarantaine l’année précédente, ce qui représente encore un niveau important comparé à ceux que nous avions connus avant la crise. Les opérations de restructuration traitées concernent majoritairement des entreprises industrielles, sachant que le Ciri couvre tous les secteurs d’activité à l’exception du secteur financier. S’il n’y a pas de secteur qui concentre l’action du Ciri, il faut noter un nombre important de dossiers dans l’agroalimentaire et l’automobile ces dernières années et, sur la période plus récente, dans la distribution.

Décideurs. Nous avons parfois le sentiment que les discussions avec les grands acteurs bancaires se sont quelque peu crispées. Les banques ayant durci leurs positions du fait notamment d’importants efforts consentis en début de crise. Qu’en est-il réellement ?
T.?R.
Effectivement, les négociations avec les partenaires financiers des entreprises ont pu être assez tendues dans quelques dossiers sur la période récente. Cela peut être lié au fait qu’en début de crise, les restructurations se sont parfois limitées à des simples rééchelonnements de dette (amend & extend), qui ont permis de gagner du temps mais pas de traiter les difficultés en profondeur. Dans le cas d’entreprises qui ont continué de subir les effets de la crise et pour lesquelles ce traitement de la dette est insuffisant, il a été nécessaire ces dernières années d’initier de nouvelles négociations, plus profondes et plus lourdes sur le traitement de la dette. Ces restructurations ont effectivement donné lieu dans quelques dossiers à des discussions assez dures avec les établissements bancaires, qui ont de leur côté également de nouvelles contraintes à prendre en compte. À cet égard, il faut relever que les banques prennent plus régulièrement la décision de céder leurs créances sur le marché secondaire, quitte à accepter des prix fortement décotés, ce qui conduit à des reconfigurations de pools bancaires, parfois en cours de négociations.

Propos recueillis par Aurélien Florin

Retrouvez la suite de cet entretien dans l'édition 2015 du guide « Réorganisation et restructuration ».

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