Avec un chiffre d’affaires de près de 30?milliards d’euros en 2009, le sixième laboratoire pharmaceutique mondial s’est lancé da une stratégie d’acquisitio offeive pour contrer la concurrence des génériques.

Avec un chiffre d’affaires de près de 30?milliards d’euros en 2009, le sixième laboratoire pharmaceutique mondial s’est lancé dans une stratégie d’acquisitions offensive pour contrer la concurrence des génériques.

L’an passé, Sanofi-Aventis, sixième laboratoire pharmaceutique mondial, a vu son chiffre d’affaires progresser de 5,3?% à taux de change constants, soit une performance nettement supérieure à la croissance du secteur, pour atteindre 29,3?milliards de d’euros. Le bénéfice net du groupe s’est lui envolé de 12,8?% à 8,47?milliards d’euros. De quoi rassurer sur le business model du groupe et sa solidité. Pourtant Sanofi-Aventis est aujourd’hui à un tournant. Il doit réorienter sa stratégie pour poser les bases de la croissance de demain et ainsi «?devenir un leader global et diversifié de la santé?». Telle est l’ambition de Christopher Viehbacher, le directeur général de Sanofi-Aventis depuis fin 2008.


La falaise des brevets
Cette ambition cache une nécessité : celle de reconstruire un groupe qui devrait perdre près de 20?% de son chiffre d’affaires en 2012. La faute à la «?falaise des brevets?» qui se profile (cf. tableau «?Les 10 meilleures ventes du groupe en 2009?»). Parmi les six meilleures ventes du groupe en 2009, cinq vont perdre leur brevet aux États-Unis avant 2012.
Comme ses concurrents, Sanofi-Aventis va de plus en plus être confronté à la concurrence des génériques tandis que ses molécules stars passeront dans le domaine public. Ces produits «?vaches à lait?» comme l’anticoagulant Lovenox, l’antithrombotique Plavix, ou l’anticancéreux Taxotere, qui ont permis au groupe de se hisser parmi les leaders mondiaux du secteur, vont ainsi bientôt pouvoir être produits par d’autres à des prix inférieurs.


La concurrence des génériques
L’an dernier, deux de ses produits, dont le Plavix en Europe, ont dû faire face à la concurrence des copies génériques. Le constat est rude et les conséquences se font déjà sentir. Pour l’Eloxatine, les ventes avaient chuté de 97?% au dernier trimestre 2009 et de 33?% sur l’année, avant que Sanofi-Aventis ne parvienne à un accord en avril?2010 avec ses concurrents pour prolonger son exclusivité aux États-Unis jusqu’en 2012. Sanofi-Aventis doit donc agir au plus vite pour compenser l’impact de ce nouvel écosystème concurrentiel sur son activité. Dans ce sens, son directeur général a lancé de grandes actions depuis sa prise de fonctions. En parallèle d’un vaste plan de réductions de coûts, qui doit permettre au groupe d’économiser 2?milliards d’euros, 7?milliards d’euros ont été investis en 2009 dans plus de trente opérations de partenariats ou rachats. Car la croissance externe est bien au cœur de la stratégie de redéploiement de la firme.


Des acquisitions marquantes
D’importantes acquisitions ont ainsi été réalisées. Parmi les plus marquantes, citons Zentiva, l’un des leaders des génériques en Europe de l’Est, racheté 2?milliards de dollars début 2009, ou Chattem, spécialisé dans la santé grand public aux États-Unis, acquis 2,2?milliards de dollars à la fin de la même année. Le groupe français est également actif dans la santé animale : au cours de cette même période, il achète les 50?% détenus par le groupe pharmaceutique Merck dans la coentreprise Merial pour 4 milliards de dollars. Les deux multinationales décident en mars?2010 de créer le numéro un mondial dans les traitements et vaccins vétérinaires, par apport croisé de leurs activités dans la santé animale – Intervet pour Merck, Merial pour Sanofi-Aventis – et un paiement en numéraire de 750?millions d’euros pour Sanofi-Aventis, ce qui leur permet de s’arroger près d’un tiers du marché mondial.


Les moteurs de croissance
Par ces multiples opérations, le groupe cherche de nouveaux moteurs à sa croissance. Comme détaillé par la direction du groupe, cinq plates-formes doivent prendre le relais en la matière : «?Les marchés émergents, où la profitabilité est comparable à celle des pays développés en raison d’investissements moindres ; la franchise diabète, qui comprend non seulement l’insuline retard Lantus (plus de 3?milliards d’euros de ventes), mais aussi Apidra, Amaryl et Insuman ; les vaccins ; la santé grand public (porté par les acquisitions d’Oenobiol et de l’américain Chattem) et enfin les nouveaux produits comme Multaq (traitement de la fibrillation atriale).?»* La transformation de Sanofi-Aventis est en marche et passe encore par les opportunités externes. Le lancement de l’offre publique d’achat (OPA) hostile du français, pour plus de 18,5?milliards de dollars, sur la biotech américaine Genzyme, n’est que le prolongement de cette stratégie d’acquisition. Si elle se réalisait, l’OPA en cours serait la plus importante opération du groupe depuis la méga fusion-absorption, à 55?milliards d’euros, d’Aventis par Sanofi-Synthélabo en 2004. Avec plus de 300 acquisitions réalisées par le laboratoire français depuis sa création il y a quarante ans, autant dire que la notion de croissance externe fait partie de l’ADN du groupe.


Pour compenser les pertes
Pour rattraper son retard dans les biotechnologies, le français a jeté son dévolue sur Genzyme. L’américain, qui réalise un chiffre d’affaires de 4,5?milliards de dollars pour 12 000 salariés, est spécialisé dans les traitements des maladies génétiques rares et développe également des traitements pour les maladies rénales ou certains cancers. Tant d’un point de vue qualitatif que quantitatif, cette proie permettrait à Sanofi-Aventis de compenser les pertes prochaines de brevets.
Pour réaliser ce type d’acquisition, le groupe, peu endetté (3,6?milliards d’euros au 30?septembre 2010), peut compter sur la solidité de son bilan pour dégager des marges de manœuvres financières. Ainsi, les analystes soulignent que du strict point de vue financier, la firme pourrait relever son offre de près de 20?% auprès des actionnaires de Genzyme.

* Pharmaceutique - Mars 2010


Défendre ses positions
Même si Christopher Viehbacher a souvent répété qu’il visait des accords d’une valeur pouvant aller jusqu’à 20?milliards de dollars, Christopher Kummer, directeur de l’IMAA, l’institut zurichois de fusions-acquisitions, pense que «?Sanofi pourrait tout aussi bien concrétiser sa volonté d’enrichir son pipeline de produits en rachetant de petites sociétés?».
Grandes ou petites, les cibles ne manquent pas. Pour autant, le groupe français devra rester attentif à la concurrence de ses pairs dans ces acquisitions. En d’autres termes, le groupe est engagé dans un «?Monopoly?» grandeur nature où chacun doit prendre des options d’achats sur un maximum d’entités pour s’assurer un avenir et palier la baisse annoncée du chiffre d’affaires.
Reste l’inflation des prix pouvant découler de cette potentielle fièvre acheteuse des laboratoires qu’il lui faudra surveiller. De plus en plus, le groupe français devra être attentif au timing du déploiement de sa stratégie d’acquisition. Seule une maîtrise du calendrier lui permettra d’avoir accès à des valorisations raisonnables. Que l’OPA sur Genzyme soit couronnée de succès ou non, Sanofi-Aventis s’annonce déterminé à défendre ses positions via une approche offensive. La partie s’annonce passionnante dans ce secteur en pleine mutation.

Les chiffres clés
• Environ 105 000 collaborateurs répartis dans 110 pays
• 29,3 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2009
• 8,43 milliards d’euros de bénéfice net en 2009
• 4,58 milliards d’euros dépensés en R&D en 2009
• 3,6 milliards d’euros de dette nette au 30 septembre 2010
• 300 acquisitions réalisées depuis sa création

Dates clés
• 1970 : naissance de Synthélabo suite à la fusion des laboratoires Dausse et Robert & Carrière. Création de Sanofi par la Société nationale des pétroles d’Aquitaine.
• 1980 : Sanofi est introduite en Bourse et acquiert le laboratoire Clin Midy.
• 1994 : Sanofi s’ouvre au marché américain en acquérant Sterling Winthrop à Eastman Kodak.
• 1999 : fusion de Sanofi et Synthélabo.
• 2004 : Synthélabo acquiert Aventis pour 55 milliards d’euros et devient Sanofi-Aventis.
• Décembre 2008 : Christopher Viehbacher est nommé directeur général du groupe. Plus de 33 acquisitions et partenariat sont réalisés depuis.

Photo : © Olvier - Fotolia.com

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