À gauche comme à droite, les propositions fusent pour imposer un régime minceur au budget de l’État.
Cent trente milliards d'euros, c'est la cure d'amaigrissement préconisée par Hervé Mariton (en photo), délégué général de l'UMP, pour redresser la France. Invité de la Fondation Concorde le 16 septembre dernier, le candidat de l’opposition a détaillé ses propositions budgétaires pour 2017. Sa promesse ? Un « budget de rigueur » qui devrait contraster avec « le manque de cohérence » de la politique budgétaire conduite depuis 2012 sous la présidence de François Hollande. Alors info ou intox ? Tour d’horizon des huit propositions du futur candidat à la présidence de l’UMP.

Réduire les dépenses publiques ?
La méthode Valls. Dans son plan d’économies annoncé en avril dernier, le Premier ministre misait sur une série de coupes visant à réduire de dix-huit milliards d’euros les dépenses de l’État entre 2015 et 2017. Cette somme s’ajoute aux neuf milliards d’euros d’économies prévues par la Loi de finance 2014 qui s’applique au budget de l’État, à ses opérateurs et aux collectivités locales.
La contre-proposition Mariton. Le député de la Drôme préconise des mesures de remplacement partiel des fonctionnaires en poste. Il défend l’idée que l’augmentation du temps de travail permettrait d’économiser entre trois et cinq milliards d’euros.
Déjà vu. En 2011, la Cour des comptes pointait du doigt la faible rentabilité financière du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Cent millions d'euros, c’est le faible gain que la règle du un sur deux aurait permis de réaliser en 2009 selon le rapport 2011 de la Cour des comptes.

Rééquilibrer le budget de l’Unedic ?
La méthode Sapin.
Alors que le déficit de l’Unedic s’élevait à 3,8 milliards d’euros en 2013, la nouvelle convention d’Assurance chômage entrée en vigueur le 1er juillet 2014 prévoit 1,9 milliard d’euros d’économies d’ici à fin 2016. Pour y parvenir, le gouvernement allonge le différé d’indemnisation [période pendant laquelle un nouveau chômeur attend avant d’être indemnisé] des intermittents et des cadres.
La contre-proposition Mariton. Il pointe le recours abusif à l'intérim qui creuse les dépenses. Réformer ce régime permettrait, selon lui, une économie de dix milliards d’euros sur cinq ans.
Déjà vu. Le régime des intérimaires est depuis longtemps l’objet des critiques de la Cour des comptes. En 2011, son déficit s’élevait à 1,7 milliard d’euros. En 2013, les Sages ont proposé de modifier la législation sur le travail intérimaire en la rapprochant de celle appliquée au régime des contrats à durée déterminée. Une évolution susceptible d’engendrer 300 millions d’euros d’économies par an.

Faire des coupes territoriales
La méthode Vallini.
À l’issue du Conseil des ministres du 3 juin 2014, André Vallini, secrétaire d’État à la réforme territoriale, évoquait « une dizaine de milliards d’euros économisés d’ici cinq à dix ans grâce aux économies d’échelle ». En réduisant de vingt-deux à treize ou quatorze le nombre de régions, la fusion des services généraux départementaux et régionaux devrait permettre d’alléger de sept milliards d’euros le budget alloué aux territoires. Les économies liées aux fusions d’intercommunalités doivent porter les économies totales à dix milliards d’euros.
La contre-proposition Mariton. Une fois n’est pas coutume, le député de la Drôme rejoint André Vallini sur trois points notables de sa réforme territoriale : la fusion des communes, la mutualisation des services entre communes et intercommunalités et la suppression des départements dans leur forme actuelle. Les calculs des deux hommes sur les économies réalisées aboutissent au même résultat : dix milliards d’euros.
Déjà vu. En décembre 2010, Nicolas Sarkozy avait déjà tenté de réformer en suivant les recommandations du Rapport, rendu par Jacques Attali (1) qui préconisait, en 2008, la suppression progressive des départements. À son actif, la création de postes de conseillers territoriaux regroupant les compétences des élus généraux et régionaux dès 2010 devait permettre, à défaut des économies liées à la disparition des départements, une réduction des dépenses publiques allant jusqu’à 190 millions d’euros par an.

Résorber le déficit des caisses de retraite
La méthode Ayrault.
La réforme de l’ex Premier ministre adoptée en décembre 2013 place le curseur de la durée de cotisation pour une retraite à taux plein en 2023 à quarante-deux ans. Celui de l’âge légal de départ en retraite est fixé à soixante-deux. Le montant des économies prévu sur cinq ans est de 7,3 milliards d’euros.
La contre-proposition Mariton. Les critères adoptés par le maire de Crest pour réduire les dépenses des caisses de retraite sont identiques, mais les curseurs se déplacent. Celui de la durée de cotisation monte à quarante-quatre ans et celui de l’âge légal de départ à la retraite à soixante-cinq ans. Cette réforme permettrait de générer vingt milliards d’euros d’économies le temps d’un quinquennat.
Déjà vu. Cela fait vingt ans que les politiques ajustent ces deux curseurs pour rééquilibrer le budget alloué aux retraites. La durée de cotisation a été allongée de 37,5 à 40 ans pour les salariés du privé en 1993, puis pour les fonctionnaires en 2003. En 2010, c’est l’âge de départ à la retraite qui est réduit à soixante-deux ans.

Combler le déficit de la Sécurité sociale
La méthode Valls
. « Onze milliards d’euros doivent être épargnés sur les dépenses de protection sociale d’ici 2017 », assenait le Premier ministre en présentant son plan d’économies au mois d’avril dernier. Trois milliards d’euros ont d’ores et déjà été économisés grâce à des réformes comme la modernisation de la politique familiale, engagée en 2013. Pour raboter encore de sept milliards d’euros, le gouvernement mise sur la dématérialisation des caisses de sécurité sociale, le décalage de la revalorisation du RSA et la réforme de l’Unedic.
La contre-proposition Mariton. À coups de « solutions que tout le monde évoque », Hervé Mariton entend dégager vingt milliards d’euros d’économies grâce à l’unification des régimes de sécurité sociale, la mise en place de la convergence tarifaire et de la médecine ambulatoire, sans oublier la suppression de l’Aide médicale de l’État (AME).
Déjà vu. Si l’AME, dispositif permettant l’accès au soin de personnes en situation irrégulière, n’a pas été supprimée, elle est devenue payante pour les bénéficiaires majeurs depuis mars 2011. Cette année-là, six millions d’euros ont été économisés sur le budget de l’assurance maladie de 162 milliards, soit 0,3 %.

Raboter incognito les prestations sociales
La méthode Valls.
Le Premier ministre l’a bien compris, une des mesures miracles pour réduire le niveau des prestations sociales réside dans la sous-indexation des allocations. Jusqu’au 1er octobre de chaque année, la quasi-totalité des prestations ne seront plus revalorisées en fonction de l’inflation.
La contre-proposition Mariton. Utilisant un dispositif identique, le délégué général de l’UMP chiffre à dix milliards d’euros les économies à réaliser sur les prestations sociales, voire plus en appliquant une désindexation totale.
Déjà vu. Selon les chiffres de l’iFrap, une telle mesure portant sur les allocations et les minima sociaux permettrait de réaliser entre deux et 2,5 milliards d’euros d’économies par an, soit dix à onze milliards sur cinq ans.

Abaisser le coût des normes et procédures
La méthode Ayrault.
Un « choc de simplification », permettant d’alléger les mesures administratives des entreprises, créerait trois milliards d’euros de coupes dans le budget de l’État en 2014, selon les estimations de Jean-Marc Ayrault en juillet 2013.
La contre-proposition Mariton. En s’attaquant au coût du respect des procédures européennes, le député de la Drôme voit plus large. Sur cinq ans, dix milliards d’euros seraient économisés grâce à la suppression de « certaines contraintes comme celles pesant sur la gestion de l’eau que les autorités sanitaires européennes jugent non nécessaires ».
Déjà vu. En 2010, l’OCDE révélait que le coût total des charges administratives françaises et européennes pesant sur les entreprises s’élevait à soixante milliards d’euros.

Économiser grâce au désengagement de l’État
La méthode Cazeneuve.
Le « nouvel élan » donné à la politique de cession immobilière de l’État en mai 2013 devrait permettre, selon Bernard Cazeneuve, alors ministre du Budget, d’engranger cinq cents millions d’euros par an jusqu’en 2016. L’année dernière, les ventes d’immobilier n’ont cependant dégagé que 391 millions d’euros contre les 530 millions prévus.
La contre-proposition Mariton. Ambitieux, le délégué général de l’UMP suggère une vente massive des actifs publics, immobiliers comme financiers, pour réduire l’endettement de l’État de quinze milliards d’euros. En ligne de mire, « un désengagement de l’État des entreprises comme Areva, La Française des jeux ou encore EDF ».
Déjà vu. Le conseil de l’immobilier de l’État chiffre à 1,2 milliard d’euros les économies annuelles réalisables par la cession des actifs immobiliers. Entre 2007 et 2013, ces ventes ont généré près de cinq milliards d’euros.

Juliette Boulay & Émilie Vidaud


(1) Rapport de la Commission pour la libération de la croissance française.

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