La perte d’influence des entreprises françaises est contredite par une étude de Bruegel et de l’Institut Peterson.
Les grandes défaites de l’entrepreneuriat français lors des dix dernières années ont commencé avec Pechiney repris par Alcan. Par la suite, l’OPA hostile déclenchée à l’initiative de Mittal Steel Company sur Arcelor en 2006, donnant naissance au géant ArcelorMittal dont le siège social se situe au Luxembourg, enfonçait le clou. Récemment, Altice, société de droit luxembourgeois, a acquis SFR, alors que Lafarge a annoncé sa fusion avec le suisse Holcim et le déplacement de son centre de décisions de l’autre côté des Alpes à cette occasion. Aujourd’hui, c’est l’avenir d’Alstom, un des leaders mondiaux en matière d’infrastructures avec un chiffre d’affaires proche des vingt milliards d’euros lors du dernier exercice, qui est au centre des attentions, étrangères comme nationales. Si le groupe présidé par Patrick Kron s’est laissé plusieurs semaines pour étudier les propositions formulées par General Electric et Siemens, il semblerait que l’offre de l’américain, 12,35 milliards d’euros, ait les faveurs du président de l’industriel. Parallèlement, l’État n’a pas caché sa stupeur lorsqu’il a appris que le constructeur du TGV était sous le coup d’une offre ferme de rachat. C’est ainsi que le concurrent allemand Siemens, bien exhorté par Bercy, est entré dans la danse. À l’image de l’épisode PSA, le gouvernement s’affaire publiquement pour sauver les grandes firmes françaises d’une mainmise étrangère. L’idée est évidemment de protéger l’emploi et les recettes fiscales mais aussi et surtout de conserver des centres de décisions dans nos frontières. L’idée, loin d’être farfelue, est reprise dans le dossier d’Octant n° 48 de l’Insee, ce dernier précisant que l’ « effet de place » ou d’agglomération des entreprises et de leurs sièges favorise nettement le développement économique d’une région. Les firmes s’installent là où elles vont trouver leurs clients et la main d’œuvre dont elles ont besoin. Mais peut-on dire objectivement que la France subisse une vague de départs de champions symbolique de son déclin économique sur la scène internationale ?

La France se porte mieux que ses voisins

La remarque n’est pas ironique. Sur le seul critère de la présence de centres de décisions par rapport au poids du PIB national, la France se porte mieux que ses voisins. En effet, selon l’étude réalisée par le think tank Bruegel et l’Institut Peterson, notre pays a plus de champions corporates que le reste de l’Union européenne notamment. Pour l’année 2013, la France est bien au-dessus de la moyenne européenne et se situe juste derrière la Suède, le Luxembourg et le Royaume-Uni en termes de nombres d’entreprises présentes dans le FT 500 list. Elle n’est pas très loin non plus des États-Unis. De même, l’indice mesurant la capitalisation des corporates reste assez favorable à l’Hexagone, moins touché par la morosité des marchés financiers que certains de ses confrères. Plus encore, l’étude relève que la France, au travers de ses entreprises phares, est en meilleure forme qu’au début de la publication de la FT 500 list, où elle affichait alors un volume de centres de décisions et un montant de market-cap inférieurs à la moyenne de l’UE.

Pour reprendre l’épilogue musical de l’enquête, la France a probablement 99 problèmes à régler mais la perte de ses champions n’en est pas un.

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