Jacques Lambert, président de l'organisation de l'Euro 2016, revient sur les aspects financiers d'une telle compétition.
Jacques Lambert : «L’UEFA assume seule les dépenses, elle encaisse seule les revenus»
Décideurs. La gestion financière d’un événement sportif ponctuel est-elle similaire à celle d’une entreprise classique ?
Jacques Lambert. Globalement, la réponse est oui puisque l’entreprise classique ou la structure d’organisation d’un événement sportif doivent toutes les deux équilibrer les recettes et les dépenses et autant que faire se peut, dégager des bénéfices. L’exigence, à la fois de résultats financiers mais aussi d’une qualité irréprochable dans le produit livré au client d’une entreprise ou au spectateur d’un événement, résulte de la même logique. Ce n’est pas parce qu’il faut organiser 51 matchs de football pour l’Euro 2016 que nous ne choisissons que des employés qui aiment ce sport. Nous essayons de recruter les meilleurs salariés possible dans leur spécialité professionnelle, et si en plus il s’avère qu’ils apprécient le sport alors, tant mieux pour la communauté, mais ce n’est absolument pas décisif.
Décideurs. Qu’en est-il du financement d’un événement tel que l’Euro 2016 par exemple ?
J. L. C’est d’une grande simplicité puisqu’en ce qui concerne l’Euro 2016, il n’existe qu’une seule source de financement, l’UEFA, à deux exceptions près : les stades et la sécurité publique. Les stades représentent des investissements d’infrastructure, propriétés des collectivités locales ou des clubs, construits pour des décennies et pour lesquels jamais l’organisateur d’une manifestation n’a à intervenir. Les événements sont ponctuels alors que les stades sont voués à être rentables sur des dizaines d’années. La sécurité publique, hors des stades, reste la responsabilité de l’État. Pour toutes les autres dépenses, l’UEFA assume seule et c’est elle qui encaisse l’ensemble des revenus de la compétition : droits télé, droits marketing, billetterie. Le système est donc simple et clair et diffère de ce point de vue de ce que l’on a connu par le passé en France. Par exemple, pour la Coupe du monde de football 1998 en France, la Fifa avait délégué à la Fédération française de football (FFF) l’organisation de l’événement tout en lui déléguant une partie des recettes, à savoir la billetterie et une partie des fruits du sponsoring. La FFF avait alors à sa charge la nécessité d’équilibrer le budget de l’organisation de la compétition, et c’est donc sur elle que pesait le risque financier. Ce n’était pas un risque mince pour la fédération et si jamais elle avait généré un important déficit au terme de l’événement, c’est l’État qui aurait dû assurer le paiement des créanciers, la Fédération étant une association loi 1901 délégataire d’une mission de service public. Dans le nouveau système voulu par Michel Platini, la répartition des responsabilités est nette, c’est l’UEFA qui paie toutes les dépenses et récupère toutes les recettes.
Décideurs. Quels types d’investisseurs l’Euro 2016 attire-t-il ?
J. L. Les recettes sont d’abord issues des droits télévisuels qui sont commercialisés directement par l’UEFA. Viennent ensuite les contrats de sponsoring répartis en deux catégories. D’une part, les sponsors internationaux dits « top sponsors », et d’autre part, les sponsors nationaux qui sont des entreprises françaises n’ayant le droit de communiquer que sur le territoire national. En troisième lieu, la billetterie avec deux millions et demie de billets à vendre, dont environ un million vendus à l’étranger. L’hospitalité est aussi un revenu et correspond à tous les services annexes au bon déroulement de l’Euro 2016 tels que la mise à disposition de loges. Enfin, les produits dérivés et licences qui les accompagnent doivent encore être négociés par l’UEFA et donneront lieu à des recettes supplémentaires avant, pendant et après l’événement.
Décideurs. Comment se portent les grandes compétitions internationales sur le plan économique?
J. L. En ce qui concerne l’Euro 2016, tout va bien pour le moment. Un peu plus de deux avant le coup d’envoi de la manifestation, il m’est toutefois difficile de prévoir ce que sera le contexte géo-politique à venir. Au niveau de la France, il n’y a pas d’inquiétude particulière, toutefois le monde réserve bien de mauvaises surprises et la situation actuelle dans l’Est de l’Europe est là pour en témoigner. Il faut aussi préciser que le savoir-faire de la France mais aussi de l’Europe en matière d’organisation d’événement international est aussi un élément rassurant. En outre, les problématiques sociétales qui sont celles du Brésil aujourd’hui, avec la confrontation richesse/pauvreté placée au regard d’une manifestation aussi chère que la Coupe du monde, sont assez éloignées de ce que l’on peut vivre en France. D’autant plus que le Brésil est également le pays hôte des Jeux olympiques de 2016 à Rio. Je regarde ce qui se passe au Brésil avec beaucoup d’attention et de vigilance mais aussi avec beaucoup de lucidité parce que nous ne sommes pas dans une situation nationale et sociale identique à celle de ce pays.
Décideurs. Le Brésil organise la Coupe du monde de football puis les Jeux Olympiques de Rio. Au vu de leurs difficultés actuelles, cette double attribution était-elle bien raisonnable ?
J. L. À titre personnel, il est vrai que je ne comprends pas bien. Il n’y a pas d’organisation collective entre le Comité international olympique et les autres associations sportives internationales telles que la Fifa mais les présidents de ces grandes fédérations sont à peu près tous membres du CIO et sont donc amenés à voter dans les deux cas de figure. Par le passé, on a plutôt cherché à éviter ces doublons et je n’ai pas très bien compris lorsque cette double attribution a été décidée. Je ne sais pas pourquoi on a fait cette fleur ou à l’inverse, pourquoi on a fait peser cette charge sur les épaules d’un Brésil consentant. À titre personnel, je ne pense pas que cela ait été très adroit.
Jacques Lambert. Globalement, la réponse est oui puisque l’entreprise classique ou la structure d’organisation d’un événement sportif doivent toutes les deux équilibrer les recettes et les dépenses et autant que faire se peut, dégager des bénéfices. L’exigence, à la fois de résultats financiers mais aussi d’une qualité irréprochable dans le produit livré au client d’une entreprise ou au spectateur d’un événement, résulte de la même logique. Ce n’est pas parce qu’il faut organiser 51 matchs de football pour l’Euro 2016 que nous ne choisissons que des employés qui aiment ce sport. Nous essayons de recruter les meilleurs salariés possible dans leur spécialité professionnelle, et si en plus il s’avère qu’ils apprécient le sport alors, tant mieux pour la communauté, mais ce n’est absolument pas décisif.
Décideurs. Qu’en est-il du financement d’un événement tel que l’Euro 2016 par exemple ?
J. L. C’est d’une grande simplicité puisqu’en ce qui concerne l’Euro 2016, il n’existe qu’une seule source de financement, l’UEFA, à deux exceptions près : les stades et la sécurité publique. Les stades représentent des investissements d’infrastructure, propriétés des collectivités locales ou des clubs, construits pour des décennies et pour lesquels jamais l’organisateur d’une manifestation n’a à intervenir. Les événements sont ponctuels alors que les stades sont voués à être rentables sur des dizaines d’années. La sécurité publique, hors des stades, reste la responsabilité de l’État. Pour toutes les autres dépenses, l’UEFA assume seule et c’est elle qui encaisse l’ensemble des revenus de la compétition : droits télé, droits marketing, billetterie. Le système est donc simple et clair et diffère de ce point de vue de ce que l’on a connu par le passé en France. Par exemple, pour la Coupe du monde de football 1998 en France, la Fifa avait délégué à la Fédération française de football (FFF) l’organisation de l’événement tout en lui déléguant une partie des recettes, à savoir la billetterie et une partie des fruits du sponsoring. La FFF avait alors à sa charge la nécessité d’équilibrer le budget de l’organisation de la compétition, et c’est donc sur elle que pesait le risque financier. Ce n’était pas un risque mince pour la fédération et si jamais elle avait généré un important déficit au terme de l’événement, c’est l’État qui aurait dû assurer le paiement des créanciers, la Fédération étant une association loi 1901 délégataire d’une mission de service public. Dans le nouveau système voulu par Michel Platini, la répartition des responsabilités est nette, c’est l’UEFA qui paie toutes les dépenses et récupère toutes les recettes.
Décideurs. Quels types d’investisseurs l’Euro 2016 attire-t-il ?
J. L. Les recettes sont d’abord issues des droits télévisuels qui sont commercialisés directement par l’UEFA. Viennent ensuite les contrats de sponsoring répartis en deux catégories. D’une part, les sponsors internationaux dits « top sponsors », et d’autre part, les sponsors nationaux qui sont des entreprises françaises n’ayant le droit de communiquer que sur le territoire national. En troisième lieu, la billetterie avec deux millions et demie de billets à vendre, dont environ un million vendus à l’étranger. L’hospitalité est aussi un revenu et correspond à tous les services annexes au bon déroulement de l’Euro 2016 tels que la mise à disposition de loges. Enfin, les produits dérivés et licences qui les accompagnent doivent encore être négociés par l’UEFA et donneront lieu à des recettes supplémentaires avant, pendant et après l’événement.
Décideurs. Comment se portent les grandes compétitions internationales sur le plan économique?
J. L. En ce qui concerne l’Euro 2016, tout va bien pour le moment. Un peu plus de deux avant le coup d’envoi de la manifestation, il m’est toutefois difficile de prévoir ce que sera le contexte géo-politique à venir. Au niveau de la France, il n’y a pas d’inquiétude particulière, toutefois le monde réserve bien de mauvaises surprises et la situation actuelle dans l’Est de l’Europe est là pour en témoigner. Il faut aussi préciser que le savoir-faire de la France mais aussi de l’Europe en matière d’organisation d’événement international est aussi un élément rassurant. En outre, les problématiques sociétales qui sont celles du Brésil aujourd’hui, avec la confrontation richesse/pauvreté placée au regard d’une manifestation aussi chère que la Coupe du monde, sont assez éloignées de ce que l’on peut vivre en France. D’autant plus que le Brésil est également le pays hôte des Jeux olympiques de 2016 à Rio. Je regarde ce qui se passe au Brésil avec beaucoup d’attention et de vigilance mais aussi avec beaucoup de lucidité parce que nous ne sommes pas dans une situation nationale et sociale identique à celle de ce pays.
Décideurs. Le Brésil organise la Coupe du monde de football puis les Jeux Olympiques de Rio. Au vu de leurs difficultés actuelles, cette double attribution était-elle bien raisonnable ?
J. L. À titre personnel, il est vrai que je ne comprends pas bien. Il n’y a pas d’organisation collective entre le Comité international olympique et les autres associations sportives internationales telles que la Fifa mais les présidents de ces grandes fédérations sont à peu près tous membres du CIO et sont donc amenés à voter dans les deux cas de figure. Par le passé, on a plutôt cherché à éviter ces doublons et je n’ai pas très bien compris lorsque cette double attribution a été décidée. Je ne sais pas pourquoi on a fait cette fleur ou à l’inverse, pourquoi on a fait peser cette charge sur les épaules d’un Brésil consentant. À titre personnel, je ne pense pas que cela ait été très adroit.