Deux ans après avoir levé quarante millions d’euros pour aider les nouvelles entreprises, le réseau Entreprendre affiche un palmarès épatant. Cyrille Saint Olive, le directeur général du relais parisien, revient avec nous sur les raisons de ce succès.

C’est en 1986 qu’André Mulliez, ancien P-DG de l’entreprise textile Phildar, créé le Réseau Entreprendre. Objectif : accompagner les nouveaux entrepreneurs pour assurer leur réussite. Trente ans plus tard, le jeune directeur général de l’antenne parisienne, Cyrille Saint Olive, nous reçoit dans les bureaux situés en plein cœur du 10ème arrondissement. Nichée dans une cour, la Filature – siège de la fondation des propriétaires de l’enseigne Auchan – abrite les pépites de demain. Sous une grande verrière à l’abri des regards, nous avons tenté de percer le secret de ce réseau, entre entrepreneuriat et histoire de famille. 

Décideurs. L’entrepreneuriat français a connu un essor formidable ces dernières années, s’est-il également transformé ?
Cyrille Saint Olive.
C’est désormais un phénomène qui concerne tous les domaines et plus seulement l’innovation technologique. Il y a dix ans, les entrepreneurs étaient des têtes brûlées qui ne souhaitaient pas embrasser une carrière classique dans une entreprise. Aujourd’hui, monter sa boîte est presque devenu la première étape de la vie professionnelle. Les jeunes sont de plus en plus nombreux à s’y risquer. Les accélérateurs, les incubateurs sont autant de dispositifs qui ont été institués pour les aider. Les écoles de commerce les poussent aussi dans cette direction. Il faut une bonne dose d’insouciance et d’audace pour s’engager sur cette voie : la jeunesse est un prérequis.

Décideurs. On entend beaucoup parler de l’entrepreneuriat social, c’est une tendance de fond ou un effet de mode ?
C. S. O. Ce phénomène a émergé il y a cinq ans. S’il a été soutenu par des institutions publiques comme la Caisse des Dépôts, il demeure relativement marginal aujourd’hui. Pour assurer son développement, tout l’enjeu est d’éduquer les entrepreneurs classiques à devenir des entrepreneurs sociaux. Cela implique un supplément d’âme : s’engager dans une culture de la responsabilité sociétale, sociale et environnementale. Le réseau Entreprendre Paris a connu quelques belles réussites telles que Môm’artre, un réseau de crèches associatif.

Décideurs. MyLittleParis, Michel et Augustin, Alcyane Consulting sont autant de succès accrochés à votre tableau de chasse. Comment les détectez-vous ?
C. S. O. La clé c’est le profil des entrepreneurs. Ils doivent apporter une vision, être humbles et savoir écouter leurs clients, leurs salariés. Au démarrage, la réussite repose à 99% sur les équipes.

Décideurs. Quel lien existe-t-il entre une famille puissante comme les Mulliez et l’entrepreneuriat ?
C. S. O. Je suis fasciné par cette famille Mulliez qui a su sur trois générations continuer à faire vivre un groupe, comptant à présent plusieurs centaines d’actionnaires. L’entrepreneuriat familial favorise le développement d’entreprises pérennes. Aujourd’hui, cela fait sens d’être associé à cette famille. C’est un modèle unique qui inspire la jeune génération d’entrepreneurs.
Kelly Deli, par exemple a été créée par un couple franco-coréen et est devenue en cinq ans une entreprise de 1 200 salariés. La cellule familiale est une de leurs forces. Pour fonder Natural Grass, Bertrand Picard s’est inspiré des recherches de son père pour développer ses gazons. Sans conteste, la stabilité de l’actionnariat et de la vision apporte une autre envergure à l’entreprise. Rapprocher entrepreneuriat et family business, c’est fort et c’est intelligent.

Décideurs. Quelle est aujourd’hui l’implication de la famille Mulliez dans le Réseau Entreprendre ?
C. S. O. Historiquement, elle est très forte car les Mulliez restent le catalyseur de cette initiative. Si ces derniers n’ont pas directement participé à l’expansion du réseau, ils continuent à nous épauler en nous hébergeant au sein de la fondation Entreprendre, à la Filature. Ils ont par ailleurs élargi leur champ d’action et parrainent de nombreuses associations comme Entreprendre pour apprendre ou la Fédération des Pionnières.

Décideurs. Est-il facile d’innover dans l’accompagnement des start-up?
C. S. O. En 2013, nous avons mis en place un programme croissance en partenariat avec Bpifrance et la Caisse des Dépôts. Il s’agit d’aider nos lauréats à aller plus loin en élaborant ensemble un plan stratégique et en leur fournissant des prêts participatifs (entre 100 000 et 300 000 euros). Avec une première enveloppe de quarante millions d’euros, nous espérons aider une centaine de projets en France et une dizaine à Paris. Une quarantaine d’entreprises ont déjà bénéficié du programme. Satisfactory, par exemple, fait du feedback management en temps réel et veut se développer à l’international. Vide-dressing, lauréate en 2011, réalise près de quarante millions d’euros de chiffre d’affaires. Elle va maintenant suivre une politique de déploiement épaulée par Philippe Houzé, le président du directoire des Galeries Lafayette. À l’heure actuelle, on ne s’adresse qu’à une petite partie des entrepreneurs, ceux qui lancent leur société. Notre idée pour l’avenir est de créer une plate-forme d’accompagnement qui soit à 360 degrés. La mission du réseau est de proposer à toutes les étapes de la vie de l’entreprise une solution et les conseils d’un chef d’entreprise d’expérience.


Propos recueillis par Sophia Sanni Soulé

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