« L’erreur que certains leaders peuvent parfois commettre est de se croire indispensables »
Décideurs. Quels ingrédients nécessaires au leadership ne sont pas assez mis en lumière ?
Michel Seydoux.
Le leadership trouve sa source dans l’éducation et plus particulièrement l’environnement dans lequel chacun va évoluer durant les premières années de sa vie. Cette période est à mon sens prédominante dans la construction de tout individu.
La personnalité, et a fortiori la capacité à mener et entraîner un groupe, commence à se dessiner dès l’enfance au sein du milieu scolaire mais également dans le cadre familial. J’attache à ce titre une importance toute particulière à la manière dont les parents vont offrir de l’autonomie à leurs enfants. Une éducation enrichissante est en effet propice au développement d’une certaine ouverture d’esprit et favorise la curiosité, ingrédients essentiels au leadership. Un tel environnement permettra également à l’enfant de développer les aptitudes nécessaires pour dominer sa timidité et attirer les regards. Un leader étant, par définition, une personne qui dispose d’un certain pouvoir d’attractivité.


Décideurs. La passion d’un seul homme comme moteur d’une équipe : comment parvenez-vous à emmener votre équipe ?
M. S.
Je ne pense pas que la passion d’un seul homme puisse être le moteur d’une équipe. Si un seul homme est passionné l’équipe ne le suivra pas. L’essence même du leadership se situe davantage dans la capacité d’un homme à transmettre la passion à l’ensemble des personnes qui l’entourent. De cette manière il va pouvoir nourrir autour de lui une réflexion commune. Pour se faire, le leader doit être à l’écoute des autres et avoir l’ouverture d’esprit suffisante pour s’enrichir intellectuellement de ses échanges. Le leader doit également savoir utiliser cette passion pour piloter son équipe. On ne peut pas emmener des personnes dans son sillage et mettre en place une certaine harmonie collective si on ne sait pas manager.


Décideurs. Au quotidien, les décisions que vous prenez sont-elles systématiquement guidées par vos valeurs ?
M. S.
Bien évidemment. Je les place d’ailleurs au centre de toutes mes décisions. On ne peut pas se départir de ses valeurs. Elles sont le résultat des acquis engrangés depuis notre enfance. Un leader respecté doit être le garant d’une certaine moralité, d’une éthique et avoir un sens des responsabilités important. Il a, par définition, besoin que ses collaborateurs aient une certaine forme de respect pour lui et adhèrent aux valeurs défendues par l’entreprise. Si ce n’est pas le cas, il est alors très difficile de la faire évoluer. Il est pour cela essentiel d’être en harmonie avec soi-même. Si on commence à transiger avec ses valeurs, on ne se respecte plus. Ces valeurs se traduisent également par le choix des hommes. Un ensemble de fondamentaux communs doit unir un leader et son équipe pour pouvoir avancer ensemble, qui plus est pour une entreprise où la charge émotionnelle est forte, comme c’est le cas dans le secteur du sport et du cinéma. Mais attention, ce système de valeurs communes n’implique pas une convergence des opinions. Bien au contraire, une divergence d’opinions peut faire naître un moment d’échange enrichissant.


Décideurs. Dans quelle mesure l’altruisme est-il une composante du leadership ?
M. S.
Un leader ne peut pas être égoïste. Il doit être à l’écoute des autres. Il doit bien évidemment se servir de ses forces pour convaincre, mais doit pouvoir, dans le même temps, être convaincu par ses collaborateurs. Plus généralement, il n’existe pas de leader qui ne fait pas d’erreurs. C’est d’ailleurs très souvent grâce à nos collaborateurs que l’on progresse.


Décideurs. Un leader doit fonder sa relation aux autres sur la confiance et encourager leur adhésion. Comment éviter alors l’écueil de la soumission ?
M. S.
Tout est une question de dosage. Il faut pouvoir se régénérer et étonner en permanence. Il me paraît en outre indispensable de s’imposer une certaine autodiscipline dans la manière dont on approche les gens. La soumission est, à ce titre, le contraire du respect. Le jour où des collaborateurs auront le sentiment d’être soumis, cela voudra dire qu’on ne les respecte plus. On en revient donc plus globalement au rôle du leader. Quelle attitude doit-on attendre de lui ? Son rôle est à mon avis de prendre les décisions stratégiques et politiques qui assureront l’avenir de l’entreprise. Pour prendre ces décisions, le leader doit s’attacher à prendre le recul nécessaire et ne pas rester collé aux problématiques quotidiennes. Je crois, à cet égard, beaucoup au management collectif et accorde une grande autonomie à mes collaborateurs. L’erreur que certains leaders peuvent parfois commettre est de se croire indispensables. Une personne qui a cette idée à l’esprit n’est pas un vrai leader. Le plus important est, à mon sens, d’être présent au bon moment.


Interview réalisée par Aurélien Florin

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