Président de Schneider Electric France depuis 2009 après une longue carrière au sein du groupe, Frédéric Abbal distingue deux dimeio da l’art de décider : intuitive et rationnelle.

Président de Schneider Electric France depuis 2009 après une longue carrière au sein du groupe, Frédéric Abbal distingue deux dimensions dans l’art de décider : intuitive et rationnelle.

Décideurs. Comment évaluez-vous la qualité d’une décision prise ?
Frédéric Abbal. Tout dépend du domaine concerné. Dans la sphère technique, opérationnelle, process, l’issue est binaire : les résultats opérationnels et financiers s’améliorent ou se détériorent. Les bons et mauvais choix sont rapidement identifiés a posteriori.
L’enjeu est alors de capitaliser l’expérience, de mettre en place une boucle informationnelle permettant un retour de données et de corriger le tir s’il y a lieu. La clé est dans l’amélioration continue. Dans ce domaine, que j’appellerais le rationnel, 80?% de bonnes décisions, c’est déjà énorme. La sphère relationnelle est un domaine où l’empirique domine largement, car on est face à nombre de possibilités et d’interprétations. Les décisions y sont donc plus difficiles à prendre et à corriger. Tout dépend de la personne et du contexte, rien n’y est modélisable.
Les valeurs intrinsèques de la personne rentrent en jeu et peuvent s’avérer difficiles à mesurer et intégrer dans une décision a priori. Par exemple, quel manager peut dire qu’il ne s’est jamais trompé en embauchant quelqu’un ? On peut ensuite tenter de modifier les traits du comportement d’un individu, mais c’est un processus long et semé d’embûches.

Décideurs. Considérez-vous que votre style de décision est plutôt démocratique ou autoritaire ?
F.?A. Dans un environnement de travail établi, mon leadership est totalement autre que dans un contexte nouveau ou de crise. Quand tout va bien, que les conditions sont normales, balisées, connues, il est intéressant d’adopter un mode de fonctionnement collaboratif en s’enrichissant des contributions des uns et des autres. Après discussion, je prends individuellement la décision, mais celle-ci s’appuie sur les opinions de mon équipe et elle peut être différente de celle que j’envisageais au départ. Le processus de choix est bien moins ouvert en cas de crise, comme ce fut le cas en 2009. Nous avons perdu 20?% de notre chiffre d’affaires en quelques mois et il a fallu agir vite pour restaurer nos marges.

Décideurs. Quelles sont les parts respectives de l’intuition et de l’analyse dans vos décisions ?
F.?A. Le management doit se baser avant tout sur des faits. Quelle que soit l’importance du feeling, des informations concrètes et tangibles sous-tendent toujours le processus. L’analyse est bien entendu essentielle et le rationnel représente peut-être 70?% de la motivation d’un choix. Pour autant, on aurait tort de se priver de l’intuition. Si l’on reprend l’exemple du recrutement, lors d’un entretien, un candidat peut être éblouissant au niveau des critères objectifs, mais ne pas arriver à convaincre son interlocuteur. L’expérience et le discernement jouent alors un rôle critique. D’une manière générale, ce feeling est d’autant plus important que le sujet traité relève de l’empirique.

Décideurs. Quelles sont les caractéristiques d’un bon leader ?
F.?A.
Un leader doit montrer le chemin en donnant l’exemple, en définissant clairement des valeurs communes et en agissant conformément à celles-ci.
Il doit inspirer une vision partagée, savoir anticiper, expliquer pourquoi tels problèmes vont surgir et comment y remédier, factualiser les causes et les effets du changement, systématiquement anxiogène.
Il met son équipe dans l’action, car personne n’a jamais créé de motivation dans l’immobilisme. Il sait déléguer, offre des choix et récompense l’excellence individuelle et collective. Enfin, il n’hésite jamais à remettre en question le fonctionnement établi, tout comme ses collègues peuvent et doivent mettre en doute son mode opératoire le cas échéant. Ce sont les principes de Schneider Electric, et j’y adhère.

1. Le principal trait de mon caractère : je suis direct.
2. La qualité que je préfère chez un individu : le fait d’avoir des valeurs, de faire preuve de transparence et d’honnêteté intellectuelle.
3. Mon principal défaut : je travaille trop !
4. Mon idée du bonheur : que mes enfants soient sur la bonne trajectoire, tant au niveau de la formation que du point de vue des comportements.
5. Mon héros de la fiction/dans la vie réelle : je ne crois pas au héros qui sauve la partie. Je pense que l’ère du héros disparaît dans un monde connecté, instantané, où on ne peut s’en sortir seul.
6. Ce que je déteste par-dessus tout : la manipulation, le manque d’éthique, la malhonnêteté.
7. La réforme que j’estime le plus : le droit de vote des femmes.

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