Pousser au développement d’une énergie verte est fondamental dans la lutte contre le dérèglement climatique. Pourtant, la transition qui commence à s’opérer n’est pas sans conséquences sur les prix de l’énergie. Les gouvernants doivent dès lors trouver des solutions pour protéger les plus vulnérables tout en insufflant le changement.

Le mieux serait-il l’ennemi du bien en matière de lutte contre le dérèglement climatique ? Le combat pour une transition énergétique la plus rapide et la plus efficiente possible est tout à fait légitime. Il permet notamment de protéger les plus pauvres, les populations les plus durement touchées par les conséquences de la hausse des températures. Pour autant, sur le moyen terme, un capitalisme tourné vers une économie plus verte ne sera pas sans impacts sur la stabilité des prix. Ce qui risque d’ébranler les plus fragiles.

Un sujet explosif

Un problème soulevé le 8 janvier par l’économiste allemande et membre du directoire de la Banque centrale européenne (BCE), Isabel Schnabel : "Les gouvernements vont devoir faire avancer la transition énergétique, tout en protégeant les membres les plus vulnérables de la société contre la pauvreté énergétique", a-t-elle affirmé lors d’un discours. Est-il encore besoin de rappeler que, pour répondre aux objectifs de l’accord de Paris, les émissions mondiales de CO2 devront baisser de 7,6 % chaque année entre 2020 et 2030 ? Une cible qui n’a même pas été atteinte en 2020 (-5,8 %), année où l’économie était en grande partie à l’arrêt en raison de la Covid-19.

"Il est à craindre qu’il faille trouver des compromis entre les ambitions de préservation du climat d’un côté  et la pérennité de l’euro et de nos économies"

D’où une prise de conscience suivie d’effets : hausse du prix du carbone, séries de propositions législatives afin de réduire les gaz à effet de serre ou encore investisseurs qui estiment désormais nécessaire de financer des projets bons pour l’environnement. Toutefois, "une hausse des prix du carbone, des taux d’imposition plus élevés sur des combustibles fossiles, une demande énergétique relativement inélastique pourraient entraîner une pression à la hausse sur les prix à la consommation pendant la période de transition", souligne Isabel Schnabel. Et ce, alors même que le sujet des prix du gaz et de l’électricité est explosif à l’heure où 8 % de la population européenne peine à chauffer correctement son logement.

Le risque inflationniste

La problématique soulevée par l’économiste est d’autant plus importante que la tendance est à l’inflation. "La transition énergétique est peu évoquée alors qu’elle constitue une menace pour la stabilité des prix dans les décennies qui viennent", estime Florent Delorme, stratégiste chez M&G Investments, dans une note d’analyse. "La montée en puissance trop lente des énergies renouvelables" ne pourra "rapidement et à un coût raisonnable se substituer aux énergies traditionnelles". Et d’enfoncer le clou : "Il est à craindre qu’il faille trouver des compromis entre les ambitions de préservation du climat d’un côté et la pérennité de l’euro et de nos économies de l’autre."

Selon Isabel Schnabel, la BCE agira si elle le juge nécessaire. Les gouvernements peuvent également mettre en place des mécanismes afin de réduire la pression des prix, comme l’utilisation des réserves énergétiques pour faire tampon lors des périodes de tensions. En tout cas, l’alerte est donnée.

Olivia Vignaud

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