Le groupe international de conseil stratégique Brunswick regroupant 1 400 experts dans 27 bureaux poursuit sa croissance et mise sur la France notamment avec l’arrivée de Hakim El Karoui à la tête du bureau parisien. L’essayiste revient sur les raisons qui l’ont poussé à rejoindre le cabinet de conseil et sa vision de l’avenir du métier.

Décideurs. Après une riche carrière, vous avez pris la tête du bureau parisien de Brunswick il y a quelques mois. Pourquoi ce choix ?

Hakim El Karoui. Parce que Brunswick permet de réfléchir et d’agir à la fois. Toutes mes précédentes expériences sont faites de cette double exigence, que ce soit en cabinet ministériel, en banque d’affaires, en conseil en stratégie, dans mon engagement associatif et bien sûr à l’Institut Montaigne.

Mon expertise se situe à l’intersection entre les mondes : la société, le business et la politique. Le groupe Brunswick est bien plus qu’une agence de communication. Nous conseillons nos clients dans la gestion de leurs "situations critiques". Pour y arriver, il faut comprendre la complexité du monde et les interactions nouvelles qui existent entre les univers. Aujourd’hui, les investisseurs sont influencés par les ONG qui regardent la planète et les citoyens, des citoyens qui votent mais qui croient de plus en plus que les solutions sont à la portée de tous les acteurs, à commencer par les entreprises.

Notre force émane de nos équipes, qui sont composées de professionnels de la communication, de journalistes et d’anciens conseils aux entreprises comme des banquiers ou des auditeurs. Ainsi, nous comprenons réellement le métier et l’écosystème des sociétés que nous accompagnons.

Quels sont les projets que vous souhaitez développer pour Brunswick ?

Tout d’abord, on a beau être leader en matière de communication financière, ce domaine ne représente qu’environ la moitié de notre chiffre d’affaires à Paris : nous sommes un conseil global qui gérons avec nos clients leurs crises, leur image, leurs affaires publiques, leur communication interne, jusqu’à la réflexion sur la transformation de leur business model du fait des exigences ESG.

Nous nous différencions de nos concurrents par notre réseau international totalement intégré, notre expertise interne très diverse et notre présence discrète mais bien réelle là où les décisions se prennent.

"Les patrons d’aujourd’hui doivent à la fois agir et dans le même temps communiquer pour rendre des comptes sur ces sujets sensibles"

Cette offre nous permet de conseiller les dirigeants confrontés à la transformation de leurs différentes parties prenantes : les actionnaires n’ont plus tous les pouvoirs, ils doivent eux-mêmes rendre des comptes au public, aux citoyens, aux clients, aux ONG, aux fonds de pension… et à leurs enfants qui leur demandent des comptes. Cette jeune génération met d’ailleurs en place une pression toujours plus forte sur les sujets d’actualité sociétale.

Je suis particulièrement frappé de voir que les patrons d’aujourd’hui doivent à la fois agir et dans le même temps communiquer pour rendre des comptes sur ces sujets sensibles. Ils sont donc en train de devenir des acteurs politiques et ils n’y étaient pas encore préparés. C’est aussi là que nous intervenons.

La crise a-t-elle changé les priorités des dirigeants face aux évolutions sociétales ?

Ce ne sont pas les dirigeants qui ont changé mais les investisseurs. Les questions environnementale, sociale et sociétale ont pris une ampleur inédite lors de la crise du Covid-19. Ce sont autant de problématiques qui doivent être prises par les dirigeants. C’est vital pour elle car une crise de gouvernance mal gérée, un scandale de harcèlement, une fuite dans une usine peuvent mettre en danger la vie même de l’entreprise.

Quels sont les conseils qui selon vous sont primordiaux pour les entreprises ?

Les modalités de communication se multiplient et se polarisent. Paradoxalement, la voix des chefs d’entreprises est moins entendue qu’avant car la parole est ouverte à tout le monde et sur tous les sujets. Leur discours doit donc sortir du formatage traditionnel pour être entendu.

Par ailleurs, les nouveaux dirigeants doivent faire leur mue : être le patron, ce n’est pas pareil qu’être directeur financier ou patron de BU, il faut incarner l’entreprise, expliquer qu’elle permet de créer de la valeur, pour les actionnaires et pour la société dans son ensemble. Nous vivons une transformation du marché qui est fascinante.

Propos recueillis par Béatrice Constans

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