Dans une interview accordée aux Échos, le commissaire européen détaille ce projet qui réunira États, industriels et chercheurs. Son but ? Doubler la capacité de production de l’UE d’ici à 2030.

L’Union européenne a perdu la bataille des semi-conducteurs mais pas la guerre. Bruxelles présentera le 5 mai une revue stratégique industrielle qui sera l’occasion de lancer une alliance "réunissant tous les acteurs de la chaîne de production des semi-conducteurs". Dans une interview accordée aux Échos, le Commissaire européen à la politique industrielle et au marché intérieur Thierry Breton esquisse les contours du projet. "L’objectif dans les semi-conducteurs est d’abord de doubler notre capacité de production et notre part de marché d’ici à 2030, pour passer de 10 % aujourd’hui à 20 % demain."

États, industriels et chercheurs réunis

Il faut dire que la crise liée à la Covid-19 a mis en avant les faiblesses de l’Union en matière de souveraineté que ce soit sur le volet sanitaire ou encore technologique. On pense notamment à la pénurie de puces électroniques qui ralentit l’industrie automobile depuis plusieurs mois. D’où la nécessité de prendre le sujet à bras-le-corps.

Le projet européen, déjà soutenu par 22 États membres, réunira des industriels et des chercheurs. "Nous sommes en train de finaliser les discussions avec NXP, Infineon, STMicroelectronics, Bosch, Siemens, ASML. Avec les chercheurs du CEA-Leti en France, de l'institut Fraunhofer en Allemagne ou l'IMEC en Belgique et aux Pays-Bas", précise Thierry Breton, ajoutant que les discussions sont aussi ouvertes aux acteurs des télécoms qu’aux constructeurs automobiles.

Le nerf de la guerre

Pour mener à bien ses ambitions, l’Europe va mettre en place un nouveau PIIEC (projet important d’intérêt européen commun). Montant de l’enveloppe ? Une vingtaine de milliards. Un budget certes important mais nécessaire au regard des investissements américains et chinois en la matière. À titre de comparaison, les industriels de l’empire du Milieu mettent sur la table 400 milliards de dollars afin de rapatrier d’ici à 2025 sur leur sol 70 % de leur consommation globale de semi-conducteurs.

L’Europe qui n’a pas su répondre présente sur les semi-conducteurs de dernière génération (7 voire 5 nanomètres) se tourne dès maintenant vers les marchés d’avenir. "Si l'on se projette à dix ou quinze ans, cela veut dire que nous devrons maîtriser les semi-conducteurs de moins de 5 nanomètres, voire de moins de 2 nm", poursuit Thierry Breton.

À la question de savoir si cet objectif n’est pas trop ambitieux, celui-ci répond : "Oui, mettre la barre à 2 nanos est ambitieux, c'est vrai, mais c'est la condition sine qua non à notre souveraineté numérique. C'est aussi la direction que prennent tous les concurrents comme Intel, TSMC ou les industriels chinois. Nous ne pouvons donc pas être absents sur ce segment." Reste à connaître tous les tenants et aboutissants de la feuille de route qui sera présentée le mois prochain.

OV

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