Dans une tribune publiée dans Le Monde hier soir, la présidente de la Banque centrale européenne (BCE) défend un traitement égal de chacun des États membres face à la pandémie. L’enjeu ? Le maintien de l’emploi et le soutien du secteur bancaire, en première ligne dans la lutte contre la crise. Retour sur les mesures clés appelées de ses vœux.

À situation nouvelle, réactions exceptionnelles. La crise actuelle, comme le rappelle Christine Lagarde, n’a pas grand-chose en commun avec les précédentes. « Le Covid-19 constitue un choc d’un genre nouveau auquel nous ne pouvons faire face à l’aide de recettes anciennes. […] Ses racines sont différentes de celles d’une crise financière ou d’une récession classique. La chute brutale de l’activité économique est une conséquence de la décision qui s’est imposée de demander à chacun de rester chez soi. » De cette situation inédite, la présidente de la BCE tire des conclusions qui s’imposent : « Nous devons concevoir des politiques en faveur de celles et ceux qui sont le plus exposés à cette crise. » Pour cela, plusieurs outils sont à notre disposition selon elle.

Soutenir l’emploi

« Mettre en place des dispositifs publics soutenant les emplois à court terme » est une nécessité première. Pour cela, « il est impératif d’empêcher que des entreprises viables ne ferment et que les employés ne perdent leur emploi en raison d’une crise temporaire dont ni les unes ni les autres ne sont responsables », explique Christine Lagarde. De plus, les banques doivent jouer le jeu en octroyant des prêts aux particuliers mais aussi et surtout aux entreprises qui ont besoin de trésorerie « leur permettant de continuer à payer leurs employés et leurs factures ».

Assurer l’accès aux liquidités

Puisque les banques sont appelées à jouer un rôle déterminant dans la lutte contre la crise, il faut leur donner les moyens de remplir à bien cette mission. Les fameux prêts garantis par l’État (PGE) ou leurs équivalents à l’étranger constituent déjà un bulle l’oxygène pour les établissements financiers. « Les garanties de crédit fournies par les gouvernements réduisent le risque de crédit pour les banques : de tels dispositifs ont déjà été mis en place à hauteur d’environ 16 % du PIB dans la zone euro. »

Plus généralement, pour s’assurer que les banques soient au rendez-vous, la présidente de la BCE rappelle que la liquidité une priorité. Pour cela, deux types de mesures doivent être prises. Les premières visent à « faire parvenir la liquidité à ceux qui en ont le plus besoin ». La facilité de prêt ciblée consentie par la BCE doit y concourir : elle fournit « jusqu’à environ 3 000 milliards d’euros de liquidité aux banques à un taux d’intérêt négatif pouvant aller jusqu’à – 0,75 % », explique l’ancienne directrice générale du FMI. Les secondes concernent l’introduction effective d’un « programme ciblé d’assouplissement des garanties, en mettant spécifiquement l’accent sur les petites entreprises, les travailleurs indépendants et les particuliers ». Et d'ajouter que « les prêts peuvent être acceptés en garantie par les banques centrales nationales de l’Eurosystème ».

Racheter « plus de 1000 milliards » d’obligations publiques ou privées

Enfin, Christine Lagarde rappelle le bien-fondé de la politique de rachat d’urgence d’obligations publiques et privées, « pour des montants importants » initiée il y a peu. L’objectif ? D’ici à la fin de la pandémie, « nous pourrons acquérir plus de 1 000 milliards d’obligations » et ainsi « garantir l’accès de tous les secteurs économiques à des conditions de financement favorables. » La politique de rachat de billets de trésorerie devrait quant à elle constituer « un soutien supplémentaire pour la gestion des flux de trésorerie et éviter les licenciements inutiles ».

Se montrer solidaire

L’ensemble de ces mesures démontrent, selon la présidente de la BCE, que « nous ne tolérerons aucun durcissement procyclique des conditions de financement au cœur d’un des plus grands cataclysmes macroéconomiques des temps modernes. » Mais, pour qu’elles soient pleinement efficaces, insiste-t-elle, « il est vital que le volet budgétaire en réaction à cette crise soit suffisamment puissant dans l’ensemble de la zone euro. » Une puissance qui passe nécessairement par l’alliance. « Un total alignement des politiques budgétaire et monétaire, et l’égalité de traitement face au virus sont le meilleur moyen de protéger notre capacité productive et l’emploi. »

S.V. 

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