Marie-Chistine Dalloz, députée LR du Jura et secrétaire de la commission des Finances revient sur la politique fiscale administrée par Emmanuel Macron depuis le début de son mandat.

Décideurs : Quel bilan faites-vous de la politique fiscale française consacrée aux personnes physiques ?

Marie-Christine Dalloz. Elle manque de lisibilité. Ces dix dernières années, les lois se sont succédées mais aucune stabilité fiscale n’a été apportée. La politique d’Emmanuel Macron a contribué un premier temps à une hausse de la CSG et de l’impôt sur le revenu. Dans un second temps, à la suite du mouvement des Gilets jaunes, les ménages les plus modestes ont bénéficié d’une baisse de l’impôt sur le revenu. Alors que le gouvernement annonce une baisse de 5 milliards d’euros sur la fiscalité, la loi de finances pour 2020 l’augmente de 15 milliards d’euros, en prenant en compte les mesures destinées aux entreprises. Je n’ai jamais vu une politique fiscale qui faisait l’unanimité. Mais la réalité c’est que les changements sont trop nombreux. Du coté des Républicains, nous aurions privilégié une meilleure maîtrise de la dépense publique.

Quelles propositions faites-vous en matière fiscale ?

La stabilité de la fiscalité est l’objectif prioritaire des Républicains. Pour constituer un budget, deux paramètres peuvent être activés : les recettes et les dépenses. Plutôt que d’augmenter les recettes, nous préférons diminuer la dépense. Or, aujourd’hui je ne vois aucune baisse de la dépense publique. Le programme d’Emmanuel Macron envisageait une réduction notable de la masse salariale de l’État. À la fin de son mandat, seulement 10 000 postes auront été supprimés. Un chiffre bien loin de ses promesses initiales. Nous proposons de cibler une baisse de la masse salariale au niveau des entités reliées aux ministères. Emmanuel Macron a aussi profité de la baisse des intérêts d’emprunts. Où sont passés les milliards d’euros ainsi économisés ?

L’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) vient de publier une étude qui a beaucoup fait parler d’elle. Le gouvernement doit-il incliner sa politique fiscale vis-à-vis des classes moyennes ?

Aujourd’hui, la politique d’Emmanuel Macron est favorable aux personnes disposant de moyens financiers importants. Le gouvernement a répondu à la crise des Gilets jaunes en baissant l’impôt sur le revenu des ménages les plus modestes. Ce que l’on reproche au Président, c’est d’avoir financé ces mesures par de la dette. En réalité, comme l’affirme l’OFCE, les personnes les plus impactées par la politique menée par le gouvernement sont les classes moyennes. Le seul avantage qu’elles en ont tiré est la suppression de la taxe d’habitation. Cette suppression devrait représenter en 2023 un manque à gagner budgétaire annuel de 18 milliards d’euros. Je regrette également qu’avec cette mesure, les communes et les départements n’aient plus aucune maîtrise en matière de fiscalité, plus aucune autonomie financière.

"C’est un manque de courage de ne pas avoir établi de mesure d’âge dans le cadre de la réforme des retraites."

L’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) a été remplacé par l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) en 2019. Quel bilan faites-vous de cette réforme ? Faut-il, comme le demandent beaucoup de Français, revenir en arrière ?

La notion de fiscalité sur la fortune improductive aurait du sens. Les objets d’art seraient alors intégrés dans l’assiette taxable. L’IFI est, à mon sens, une façon de pénaliser les propriétaires fonciers importants. Certes, les sommes prélevées au titre de l’IFI ne sont pas anecdotiques, mais par rapport à ce que représentait l’ISF, c’est symbolique. Pour Les Républicains, taxer l’immobilier n’était pas la meilleure option. Nous avions la volonté de supprimer l’ISF mais pas de le remplacer par l’IFI. Notre volonté a toujours été de diminuer les impôts de production, et non le contraire.

Le gouvernement n’a finalement pas su ramener le déficit public sous la barre des 3 % du PIB, doit-il être envisagé la fin de la règle des 3 % ?

La règle des 3 % permet d’éviter des dérives comme celles qu’ont pu connaître la Grèce ou l’Italie. La France reste le plus mauvais élève au niveau du déficit public. Aujourd’hui, on emprunte énormément d’argent sur les marchés financiers avec des taux négatifs. Ainsi, notre masse d’intérêts nette diminue. C’est cependant un pari à risque si les taux d’intérêt venaient légèrement à augmenter et de plus c’est une dette que l’on transfère aux générations futures.  

Pourquoi les Républicains s’opposent-ils à la réforme des retraites alors que celle-ci semble s’inscrire dans la continuité de celles qui ont été portées par les gouvernements de droite ? 

Le gouvernement a choisi de garder l’âge légal et de supprimer la notion de durée de cotisation. Cela implique une liberté de choisir, mais aussi une super décote. C’est un manque de courage flagrant de ne pas avoir établi de mesure d’âge. Les Français vont bien comprendre, lors des simulations, qu’il est préférable de travailler plus longtemps. C’est ce point que nous contestons. Les Républicains souhaitent mettre en place une mesure d’âge à 65 ans. Cela permettrait d’avoir des excédents qui pourraient alimenter deux aspects : la pénibilité et le travail des seniors. Demander aux Français de travailler plus longtemps imposera d’œuvrer à l’employabilité des seniors.

Propos recueillis par Chloé Buewaert

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