La 18e édition du PEX s’est tenue au pavillon d’Armenonville le 27 novembre 2019 à Paris. L’occasion, pour toutes les parties prenantes d’un écosystème en plein essor, de faire le bilan de l’année mais surtout d’évoquer les perspectives prometteuses du capital-investissement.

Le coup d’envoi de cette dix-huitième édition du private equity exchange a été donné par Jean-Luc Allavena, chairman de Atlantys Investors, et Michel Giannuzzi, président et directeur général de Verallia. C’est sous le signe de l’optimisme qu’a commencé cette journée riche en partage d’expériences. Une multitude de professionnels  ̶  CEO, managers, fonds d’investissements ou encore conseils stratégiques, financiers ou juridiques  ̶  ont échangé sur les défis à relever dans l’univers du capital-investissement. Attirer le meilleur du management, identifier les bonnes opportunités et travailler les relations avec ses partenaires sont autant de sujets qui ont animé les nombreuses conférences de cette édition. Pour simplifier, la réussite d’une opération de private equity repose sur le degré de confiance qui rattache une entreprise aux « stakeholders »  ̶  marché, banques, conseils, management, fonds, etc. Michel Giannuzzi en témoigne : « Comment structurer une opération équilibrée dans le private equity ? La confiance. Dites ce que vous allez faire et faites ce que vous avez dit ».

Pas de succès sans préparation

Au risque de verser dans la lapalissade, les professionnels invités à témoigner étaient unanimes quant à l’absolue nécessité de préparer minutieusement une opération d’investissement. Et, à les entendre, la règle s’applique à tous, qu’il s’agisse des actionnaires, de l'investisseur, du cédant ou du management. L’idée de fonds, résumée dans une formule devenue célèbre : il faut parvenir à aligner les intérêts en présence. « Le premier mois qui suit la réalisation de la transaction est entièrement consacré à passer en revue le business plan de la société dans laquelle nous venons d’investir. C’est le meilleur moyen de s’assurer que nous avons les mêmes objectifs que ceux des dirigeants et des autres actionnaires », explique François Barbier, directeur général du fonds 21 Invest. L’ouverture du capital est aussi l’occasion, pour l’entreprise concernée de mettre à jour son business plan. « En tant qu’opérationnel, nous ne passons pas notre temps à actualiser notre feuille de route. L’arrivée d’un d’investisseur nous pousse à prendre du recul et à redéfinir nos priorités. À ce titre, la phase de préparation de l’opération est l’une des plus importantes pour la réussite des relations entre actionnaires de long terme et dirigeants », précise David Sylberg, directeur général délégué finances chez Elsan.

Le business plan, objet de toutes les attentions

Concrètement, pour Guillaume Giuliani, avocat associé du cabinet Desfilis, cela revient à « contractualiser le business plan ». « Précisément établi, [celui-ci] prévoit des éléments essentiels de la transaction comme la courbe de rétrocession ou les mécanismes anti dilution. En un mot, il matérialise l’alignement des intérêts du vendeur, de l’acquéreur et du management », résume l’expert. Une analyse partagée par son confrère Guillaume Rembry, associé fondateur du cabinet Eight Advisory Avocats, qui ajoute que le management package est une étape essentielle également dans la réussite du deal. « Comme il prévoit et encadre les risques sociaux et fiscaux encourus, ce document doit attirer toute l’attention des parties concernées, explique le professionnel. D’ailleurs la récente stabilisation de la jurisprudence conduit à abandonner différents mécanismes agressifs qui n’ont plus lieu d’être comme les BSA ou les conventions de stabilisation des plus-values ».

Saisir les opportunités

Avec des relations qui s’inscrivent sur le long-terme, les participants ont partagé les spécificités de leurs marchés régionaux. Alors qu’en Europe et aux États-Unis, il est davantage question d’opérations de « share deal »  ̶  racheter les actions de sociétés exploitant des actifs existants  ̶ , à l’inverse, sur le continent africain par exemple, il s’agit plus « d’asset deal »  ̶  racheter directement les actifs  ̶  et parce que plus qu’ailleurs, il faut construire. C’est précisément le point développé par Stéphane Colin, director and head of Paris office Africinvest : « Au lieu d’acheter une école, un hôtel, nous les construisons. Ce capital déployé se révèle très profitable ». Ces particularités géographiques peuvent s’accompagner d’une évolution de la typologie des actionnaires. C’est ce que précise Brian Wardrop, managing partner chez Arx Equity, qui intervient en République tchèque, où le marché est en pleine reconstruction depuis la fin de l’ère communiste, en parlant de « première génération de propriétaires de groupes ». Dès lors, reconstruire le tissu économique et social, éduquer les entreprises au private equity sont des défis qui nécessitent une adaptation constante des professionnels, et un jeu qui relève autant de la stratégie que de la séduction.

Transformation : assister le dirigeant sans l’éclipser

L’industrie du capital-investissement est entrée dans une phase où « le levier de la transformation n’a jamais autant compté », concède volontiers Olivier Marchand, managing partner de FnB Private Equity. Il s’agit moins d’appuyer sur le bouton « Financial Leverage » que de passer la société, objet du LBO, au scanner des transformations susceptibles d’accélérer sa croissance. Bertrand Piens, président de Fontenay Operating Partners, abonde dans le même sens et reconnaît que « les fonds appellent de plus en plus ». En amont du deal d’abord, où les GPs peuvent souhaiter une validation de business plan avant d’engager des sommes significatives dans les due diligences et l’exécution. Ensuite, lors de la vie de la participation en portefeuille, pour s’assurer que les projets de transformation (digitalisation, refonte de la supply chain, organisation de l’entreprise, ajoute de lignes métiers, M&A, etc.)  sont bien en ligne avec le business plan. Le risque : l’immixtion trop forte des conseils extérieurs ou du fonds lui-même dans la gestion opérationnelle du groupe. Il faut donc veiller à ce que le dirigeant reste bien maître en sa demeure.          

Sans build-up, point de salut ?

L’entrée au capital d’un nouvel actionnaire professionnel ouvre la voie à de nouvelles opportunités pour l’entreprise qui peut espérer booster sa croissance par le biais d’acquisitions. Le savoir-faire d’un fonds s’avère alors particulièrement utile pour définir puis mettre en œuvre cette stratégie. « On crée de la valeur par la croissance. Le build-up est central dans la vision stratégique d’un groupe. D’ailleurs, de telles opérations sont parfois déjà préparées alors même que le fonds n’a pas encore réalisé son investissement », confirme François Barbier. Un avis partagé par David Sylberg. « Le M&A constitue un levier de création de valeur à condition de bien acheter  ̶  pour ce faire, le travail de sourcing est primordial  ̶ , d’avoir d’un projet opérationnel clairement défini et de pouvoir générer assez de cashflow pendant toute la durée de détention des entités acquises ». Si le principe du build-up semble ne pas poser question, attention toutefois aux conditions dans lesquelles il se réalise. « Avec des délais d’exécution toujours plus resserrés, savoir s’entourer des bons conseils s’impose, prévient Guillaume Rembry. Des conseils qui doivent être à même de faire circuler l’information de manière fluide car c’est uniquement dans ces circonstances que des synergies peuvent être dégagées, notamment en matière de fiscalité », explique-t-il.

Un marché plein d’avenir

Dans un contexte de multiples toujours élevés et de baisse des volumes, quel avenir pour le capital-investissement ? « Nous ne faisons plus le même métier » avance Patrice Verrier, managing partner chez Abénex. « Les fonds sont plus présents qu’il y a dix ou quinze ans » affirme Stéphane Blanchard, senior partner chez Advancy. Dans le processus de cession, le travail est beaucoup plus approfondi qu’auparavant, et les investisseurs en capital anticipent leur sortie bien en amont avec une logique plus industrielle que financière. « Le système fermé LBO sur LBO est efficient » ajoute Stéphane Blanchard. Peut-on alors rester sous LBO indéfiniment ? La réponse est apportée par Louis Godron, managing partner chez Argos Wityu : « Si les valorisations restent raisonnables, il n’y a pas d’inquiétude à avoir ». Un avis partagé par Patrice Verrier : « Les fonds sont de plus en plus gros donc les sociétés peuvent rester plus longtemps sous LBO », précise ce dernier avant d’ajouter, confiant, « il y aura plus de LBO à l’avenir ».

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