Plus orienté que jamais vers les services, l’Apple de Tim Cook est entré en phase de consolidation, alors que les ventes de smartphones atteignent un palier. Une étape cruciale que le successeur de Steve Jobs réussit en gardant la tête froide.

Après huit ans à piloter Apple en solitaire, Tim Cook imprime enfin sa marque. Les années écoulées décrivent un bilan plutôt positif, dégagé de l’ombre tutélaire de Steve Jobs sans dévoyer son héritage. La marque visionnaire a toujours su donner le la dans le design produit. Autant dire que l’inquiétude était à son comble, lorsque que le tout nouveau PDG a congédié quelques personnalités clés de la firme américaine. Ainsi, en 2012, la mise au ban du développeur Scott Forstall, maître d’œuvre du système d’exploitation iOS, avait semé le doute dans les esprits. En juin dernier, c’est Jonathan Ive, en chef du design made in Apple qui a quitté le navire. Cette fois, pour ne pas faire de vagues, Tim Cook avait scellé un partenariat en bonne et due forme avec Love From, le cabinet que Jony Ive avait monté.

Ce qui irritait chez le successeur de Steve Jobs, son sens aigu de la gestion d’entreprise et sa recherche de profits tous azimuts, se révèle être aujourd’hui ses meilleurs atouts. En peu de temps, Tim Cook a satellisé la cour du Roi Soleil défunt Steve Jobs, chacun de ses favoris étant bien décidé à ce que son département préside au destin d’Apple. Il a permis à l’entreprise de garder le cap, quitte à mettre au pied du mur les investisseurs dubitatifs : les orientations de la société ne leur conviennent pas ? Alors, qu’ils partent ! On est loin de la mollesse de caractère décrite par certains…

Hauteur de vue et consolidation

Avec Tim Cook, mieux vaut oublier le mysticisme auquel Steve Jobs avait habitué ses adorateurs. À la place du grand prêtre de la Tech soumis à des intuitions marketing géniales, voilà un homme pragmatique, conscient des virages économiques à prendre pour maintenir la marque au firmament. Le PDG, qui a rejoint Apple en 1998, a fait ses premières armes chez IBM pendant douze ans. Douze années à voir de ses propres yeux comment une société rutilante de croissance et d’innovation jusqu’à la fin des années 1980 a décliné comme une Rome de l’IT.

Ses orientations à la tête d’Apple sont typiques d’une société en phase de consolidation. En juillet de cette année, il a ainsi racheté la division modem d’Intel pour un milliard de dollars. Une acquisition judicieuse. Le but est de maîtriser toute la chaîne de valeur pour produire ses appareils de A à Z. Chacun des composants informatiques est estampillé Apple et revient moins cher, du fait de la maîtrise des coûts.

Avec Tim Cook, mieux vaut oublier le mysticisme de Steve Jobs

Quant aux investissements voulus par Tim Cook en recherche et développement, ils augurent d’un regain de créativité : pas moins de 4,2 milliards de dollars ventilés sur l’année 2018, Apple n’avait pas autant investi en R&D depuis 2003. Un signe qui ne trompe pas, même si d’autres poids lourds du secteur consacrent davantage à leur prospective (7,9% du chiffre d’affaires à cet effet chez Apple contre 13,4 % chez Microsoft par exemple).

Apple as a service

Les ventes en baisse de l’IPhone, la star d’Apple, accusent la fin d’une logique commerciale lucrative. Sans sonner l’hallali, un plafond semble atteint sur le marché occidental, tandis que les prix des produits estampillés d’une pomme ne lui permettent pas de concurrencer Samsung, Huawei et Oppo, nouveau trio gagnant de la téléphonie mobile pour l’année écoulée, particulièrement dans les pays émergents.  Aujourd’hui, l’IPhone représente moins de 50 % du chiffre d’affaires d’Apple. Une première que la firme a anticipée. Ses stores constituent un écosystème de distribution (AppleStore) et de paiement (ApplePay) leader sur des secteurs comme la musique ou le livre numérique. La mutation d’Apple sur le segment des services est assurée avec une diversification liée notamment aux contenus à fort capital émotionnel (les industries culturelles, bientôt la télé en streaming).

Nicolas Bauche

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