À l’issue d’un procès aux Prud’hommes, Morgan Stanley a été condamné à verser la somme de 1,4 millions d’euros à son ancien banquier Bernard Mourad. Mettant notamment en lumière les différences entre le droit français et le droit américain, ce verdict, du fait de son caractère inédit, pourrait inquiéter de nombreuses banques à travers le monde.

Le fin mot de l’histoire, du moins avant un éventuel appel de la banque américaine, est venu d’un juge « départiteur », magistrat d’un tribunal de grande instance appelé en renfort lorsque les acteurs d’un dossiers prud’hommal ne parviennent pas à s’entendre. Sa décision vient trancher un litige vieux de cinq ans entre le banquier de Patrick Drahi et Morgan Stanley.

Le droit français prime sur le droit américain

Le milliardaire français, devenu l’une des plus grosse source de commission de la banque américaine, avait permis à Bernard Mourad de se voir octroyer un bonus par son employeur ainsi qu’une attribution d’actions pour les années passées de 2012 à 2014, avec un montant avoisinant 1,4 millions d’euros. Cependant, l’annonce du départ de ce dernier pour Altice, le consortium de Patrick Drahi, avait entrainé le blocage par Morgan Stanley de ce montant.  

La raison ? Une règle usuelle dans le monde de la banque qui ne permet pas le versement de bonus différés si le récipiendaire quitte la structure. Cette pratique courante est connue des banquiers et ces derniers se font d’ailleurs souvent verser ce dernier par leur nouvel employeur, en l’incluant dans la négociation.

Bernard Mourad a donc intenté une action en justice afin de récupérer le montant promis auprès de Morgan Stanley au moyen d’un angle d’attaque simple. Le droit français interdit le paiement d’une rémunération acquise sur période échue à la condition d’une présence ultérieure du salarié. Le contrat de travail de Bernard Mourad étant français, il n’aurait aucune raison de s’assujettir au droit américain permettant cette pratique. Les Prud’hommes ont finalement accédé à sa demande.

Une boite de pandore ouverte ?

Cette décision totalement inattendue risque, si elle est confirmée, de changer les règles du jeu et d’inciter les banquiers n’ayant pas touché leurs bonus de les réclamer à leur ancien employeur. L’addition se révèlerait dans ce cas salée, les plans de rémunération différées représentant environ la moitié des bonus des banquiers et se chiffrent à plusieurs centaines de milliers d’euros par salarié.

Théo Maurin-Dior

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