Les élections européennes de 2019 riment avec le renouvellement de plusieurs postes clés au sein des institutions européennes. Parmi lesquels on compte les présidents de la Commission, du Conseil Européen et de la Banque Centrale Européenne (BCE). Actuellement à la tête de l’organe financier européen, Mario Draghi, 71 ans, cédera sa place au mois d’octobre. Plusieurs personnalités sont d’ores et déjà pressenties pour occuper ce poste clé.

Au terme de son mandat de président de la BCE, Mario Draghi aura passé huit ans à occuper l’un des postes les plus convoités si ce n’est l’un des plus influents au monde. Huit années au cours desquelles Mario Draghi a tenu la barre au cœur des crises économiques qui ont déferlé sur l’Europe et le Monde. Son successeur aura fort à faire pour diriger l’institution capable de faire la pluie et le beau temps dans la sphère politico-financière : lancer un nouveau débat sur la politique monétaire, maintenir l’objectif d’inflation ainsi qu’anticiper la potentielle crise annoncée.

François Villeroy de Galhau : un français au cœur de l’Europe

À 60 ans, le gouverneur de la Banque de France présente un parcours bien fourni. Ce haut fonctionnaire originaire de Lorraine exerce ses fonctions actuelles depuis 2015. Passé par Polytechnique et l’ENA, François Villeroy de Galhau a débuté sa carrière en tant que chargé de mission à la direction du Trésor. Sa première expérience avec les institutions européennes arrive dès 1990, période à partir de laquelle il est conseiller européen du ministre des Finances, puis du Premier ministre Pierre Bérégovoy. Avant d’être nommé directeur de cabinet de Dominique Strauss-Kahn entre 1997 et 1999, il poursuivait son expérience européenne à Bruxelles en qualité de conseiller financier à la représentation permanente de la France. Membre de la famille fondatrice du groupe Villeroy & Boch, François Villeroy de Galhau passe dans le privé en 2003 en devenant P-DG de Cetelem, société de crédit à la consommation. Son profil change d’envergure en 2008 lorsque BNP Paribas lui confie la responsabilité de la banque de détail en France. Il devient ensuite directeur général délégué du groupe entre 2011 et 2015. Européen convaincu, son expérience lui sert à appréhender les évolutions économiques et sociales contemporaines. En plus d’être le premier dirigeant de la Banque de France à rendre sa rémunération publique, il prend régulièrement position sur des sujets monétaires et financiers comme le bitcoin qu’il estime ne pas être une monnaie, ou encore concernant les dangers liés à la montée des partis extrémistes en France et en Europe. Dans le prolongement de la politique monétaire mené par Mario Draghi, il est perçu comme étant plus souple que les autres pressentis à la direction de la BCE, notamment sur le sujet des taux durablement bas qui cristallisent particulièrement l’attention des pays du Sud. Reste enfin une anecdote loin d’être anodine : François Villeroy de Galhau parle couramment allemand…

Jens Weidmann : l’international

Président de la Bundesbank (Banque fédérale d’Allemagne) depuis 2011, Jens Weidmann, 51 ans, est certainement le plus international des potentiels présidents de la BCE. Il a étudié l’économie à l’université d’Aix-en-Provence, puis à l’université Frédéric-Guillaume de Bonn. Très tôt, il découvre le monde des banques centrales au cours des stages qu’il effectue à la Banque de France, sous la direction de Jérôme Henry, et de la Banque centrale du Rwanda. Il entre au FMI, où il travaille deux ans entre 1997 et 1999. De 1999 à 2003, il est secrétaire général du Conseil allemand des experts économiques. Il rejoint finalement la Bundesbank en 2003 au poste de directeur du département d'analyse de la politique monétaire. En 2006, Angela Merkel le nomme chef de la section politique économique et financière à la Chancellerie fédérale. Au cours de cette expérience, il est le leader des négociations pour le compte de son pays aux sommets du G7 et du G20 en 2007. Il a également œuvré au sauvetage d’Opel ou à la recapitalisation d’EADS et de la Grèce. C’est une nouvelle fois. En marge des élections européennes de mai 2019, Jens Weidman s’est publiquement exprimé sur le fait qu’il n’était pas nécessaire de changer la politique de la BCE malgré la faiblesse palpable de l’économie de la zone euro. Toutefois, son profil se dresse comme l’un des garants de la rigueur économique allemande. Dans ce cadre bon nombre de pays du Sud, bénéficiant du contexte de taux bas, n’apparaissent pas comme partisans de l’intronisation du quinquagénaire allemand.

Olli Rehn : pro-européen et complémentaire

Olli Rehn, 57 ans, est gouverneur de la Banque de Finlande depuis le 12 juillet 2018. Si son expérience à ce poste est récente, cela n’en fait pas un novice sur la scène politique européenne. Son profil est imprégné par la culture européenne. En effet, il parle couramment cinq langues parmi lesquelles le français, l’anglais, le finnois, le suédois et l’allemand. Utile pour poser ses valises à Francfort… Par ailleurs, il présente un parcours différent des autres responsables cités pour diriger la BCE. Il a obtenu un diplôme de sciences économiques, relations internationales et de journalisme en 1983 au Macalester College de Saint-Paul, dans le Minnesota. Il décroche son doctorat d’économie politique internationale à l’université d’Oxford en 1996. En 1991, il est élu à l’Eduskunta (parti finlandais centriste) et prend aussitôt la présidence de la délégation finlandaise à l'Assemblée parlementaire du conseil de l’Europe. Après avoir été conseil spécial du Premier ministre finlandais Esko Aho, il devient chef de cabinet à la Commission européenne dès 1998. Il quitte brièvement la sphère publique en 2002 pour se consacrer au monde universitaire. Il occupe ensuite plusieurs postes de commissaire européen entre 2004 et 2014, année à laquelle il devient vice-président du Parlement européen. En 2015, il est nommé ministre des affaires économiques en Finlande. Son profond réseau au cœur des milieux politiques et financiers, combiné à ses aptitudes de communicant ainsi qu’à son expérience européenne font de lui le candidat le plus à même de contenter la majeure partie des sensibilités nationales.

Yacine Kadri

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