Les taux bas remettent en cause le fonctionnement du placement préféré des Français. Pour rester compétitif, les assureurs ont su s’adapter en proposant des solutions sur mesure. La future hausse des taux, annoncée pour 2017, leur permettrait de retrouver leurs marges. À moins que la loi Sapin 2 n'effraie les épargnants.

Lancée en 1818, l’assurance-vie continuent de séduire. Selon un sondage réalisé par Odoxa-LinXea pour Le Parisien, 57 % des Français ont déjà souscrit à ce genre de placement. C’est même leur placement préféré puisqu’ils sont 43 % à le plébisciter, loin devant le livret A (27 %) et le PEL (22 %). À la question, « pour quelle raison principale avez-vous une assurance-vie ? », les participants ont répondu à 36 % pour « mettre de l'argent de côté en cas de coup dur », à 25 % pour « préparer sa retraite », à 19 % « pour préparer ma succession » et, seulement, à 18 % « pour disposer d'un placement rentable ». Une hiérarchie étonnante au vue des performances affichées par ce placement.

 

2,3 % de rendement en 2015

 

En 2015, le rendement moyen de ces contrats investis sur des fonds en euros s'élevait, d'après la Fédération française de l'assurance (FFA), à 2,30 %, frais de gestion déduits. Si l'on en retire encore les prélèvements sociaux (15,5 % depuis 2012) et une inflation de 0,2 % en 2015, l'assurance-vie a rapporté en moyenne 1,7 % d'intérêts l'an dernier. Bien mieux que le livret A et le PEL et aussi bien et beaucoup moins risqué que les placements en action.  

 

Mais les taux bas pourraient bien mettre fin à ces performances. En octobre, les taux à court terme s’établissaient à - 0,4 %, une première. Les fonds euros, qui promettent aux clients un taux garanti tout en le complétant le cas échéant par une prime au titre de la participation aux bénéfices, sont particulièrement touchés. Pour le moment, les assureurs se servent de leur réserve pour garantir des taux corrects. Mais pour combien de temps ? Aujourd’hui, avec son rendement, son capital garanti et ses avantages fiscaux, le contrat en euros est un produit rare, voire de luxe.

 

Résultat, de nombreuses sociétés arrêtent de commercialiser ces produits ou les réservent à leurs meilleurs clients. D'autres préfèrent baisser leur rémunération. Alors que le taux garanti pouvait s’élever à 3 % ou 4 %, celui-ci est désormais très souvent nul. Certains n’arrivent même plus à garantir le capital. Comment en est-on arrivé là ? Auparavant, grâce à des taux de rendement obligataires souverains de 4 %, les assureurs avaient les moyens de garantir le capital investi. Les seules retombées de coupon permettaient de compenser les éventuelles pertes sur les autres catégories d’investissement. Aujourd’hui, avec des taux nuls, le système ne fonctionne plus.  

 

Hausse des taux attendue

 

Pour sauver l'assurance-vie, il faut trouver un équilibre entre les engagements que l'assureur peut formellement prendre, nécessairement inférieurs au niveau des taux dits sans risque, et la gourmandise des épargnants. Ces derniers doivent être capable de raisonner en nominale et d’accepter des taux de rémunération proches de zéro. Bien sûr, il s'agit là d'un plancher et la participation aux bénéfices leur permettra très souvent de surperformer cet engagement. Pas sûr néanmoins que les particuliers soient séduits par cette nouvelle version. En fonction de leur aversion au risque, ils pourraient se tourner vers d’autres placements, comme les unités de compte, qui permettent d’investir en Bourse, ou l’euro-croissance, un produit qui offre une bonne espérance de rendement tout en garantissant le capital à terme.

 

Les professionnels de l’assurance-vie ne s’inquiètent pas pour autant. La hausse des taux, qui devrait intervenir au cours de prochains mois, leur redonnera une bouffée d’air. Pour eux, le principal risque est avant tout réglementaire. En effet, une des mesures de la loi Sapin 2 prévoit qu'en cas de crise financière grave les retraits sur les fonds euros soient bloqués. Si ce mécanisme a surtout pour objectif d’éviter aux gestionnaires de mettre la clé sous la porte en cas de choc majeur, les Français craignent que cela remettent en cause leur droit sur leur épargne. Ainsi, 70 % des Français sont opposés à cette mesure. En plus d’être performants, les assureurs devront désormais faire preuve de pédagogie pour rassurer leurs clients.

 

Vincent Paes

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