À Douai le 16 décembre, les juges de la cour d’appel ont approuvé le non-lieu concernant la plainte pour pratiques commerciales trompeuses contre Auchan. La décision écarte la responsabilité d’Auchan dans le drame du Rana Plaza, contrairement à ce que soutiennent les associations plaignantes.

Une fois de plus la justice déboute les associations Sherpa, Ethique sur l’étiquette et Peuples solidaires. Les associations tentent depuis 2014 d’obtenir une reconnaissance judiciaire de la responsabilité d’Auchan dans l’affaire du Rana Plaza. Sans succès. Les juges de la cour d’appel de Douai ont, le 16 décembre, confirmé l’ordonnance de non-lieu rendue par le juge d’instruction.

Enquête bâclée

L’effondrement du Rana Plaza, survenu le 24 avril 2013, avait causé la mort de plus de 1100 ouvriers textile qui travaillaient pour de grandes marques occidentales. La tragédie a soulevé la question de la responsabilité des multinationales face à leurs chaînes de sous-traitance et leurs activités délocalisées. Un an après l’incident, Sherpa, Ethique sur l’étiquette et Peuples solidaires ont déposé une première plainte au parquet de Nanterre contre Auchan, dont des étiquettes de sa marque distributeur In Extenso avaient été retrouvées dans les décombres, pour pratiques commerciales trompeuses. Avec une idée en tête : faire valoir le décalage entre les engagements éthiques de l’entreprise – destinés à rassurer ses consommateurs – et la réalité des conditions de travail des individus à l’origine des produits qu’elle commercialise. Cette première plainte a été classée sans suite en janvier 2015. Les associations ont porté une nouvelle plainte, avec constitution de partie civile, en juin 2015, qui a abouti un nouveau non-lieu prononcé le 27 avril 2022. Les associations avaient interjeté appel de la décision de non-lieu en mai dernier.  

La justice française justifie le non-lieu par une insuffisance de preuves. Les associations expliquent que la commission rogatoire internationale transmise par le juge d’instruction français aux autorités bangladaises n’a jamais abouti :Aucune enquête n’a pu être effectuée au Bangladesh, faute d’aboutissement de cette commission rogatoire internationale et notre demande d’enquête complémentaire en France restée sans succès.” Elles soulèvent d’ailleurs la “défaillance du système d’entraide judiciaire” alors même queles éléments récoltés lors de leur enquête sur le terrain devraient permettre la poursuite de l'affaire”. Pour les associations, l’enseigne ne peut avoir ignoré les conditions de travail et de sécurité dégradées des travailleurs bangladais.

Devoir de vigilance

L’effondrement de l’usine a également eu un retentissement particulier en France : la loi du 27 mars 2017 sur le devoir de vigilance des entreprises a été adoptée pour contraindre les sociétés à prévenir les atteintes graves envers les droits humains et l’environnement, y compris chez leurs sous-traitants. Un fondement régulièrement invoqué par les ONG (notamment à l’encontre de Casino et McDonald’s de la déforestation en Amazonie ou de la BNP pour le financement de nouveaux projets fossiles). Un texte européen est en préparation.

Anne-Laure Blouin

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