Élue présidente de l’Alliance des gérants de fortune suisses (ASWM) en mars 2022, Nicole Curti aura la tâche de porter les projets communs des membres. L’ex-vice-présidente de l’association créée en 2016 pourra compter sur ses dix ans d’expérience chez Lombard Odier et quatorze chez Stanhope Capital pour mener à bien son mandat.

Décideurs. Qu'est-ce que l'ASWM ?

Nicole Curti. En Suisse on dénombre 2 500 gérants indépendants avec des problématiques communes, liées à l’opérationnel, l’informatique, la réglementation, les investissements, les relations avec les banques dépositaires, les ressources… Il y a six ans, un groupe de gérants s’est réuni avec l’ambition de créer une alliance afin de s’entraider sur ces différents sujets. Aujourd’hui nous comptons une quarantaine de membres représentant 130 milliards de francs suisses d’avoirs sous gestion. Chaque membre qui souhaite intégrer l’Alliance doit gérer au moins un milliard de francs, afin que les enjeux opérationnels soient de même nature pour tous.

"Nous comptons une quarantaine de membres représentant 130 milliards de francs suisses d’avoirs sous gestion"

Nous organisons de nombreuses rencontres, formations et conférences pour tous les membres. L’idée est de partager, d’échanger et d’ouvrir les portes, cela crée une très belle dynamique. Nous sommes en contact également avec la Finma (Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers), curieuse de notre fonctionnement et de nos défis communs.

Pour rester dynamique, nous avons dès le début mis en place une gouvernance permettant le renouveau.  Les membres du conseil sont élus pour deux ans, renouvelables deux fois, pour une durée totale maximum de six ans. Nous sommes arrivés récemment à la fin du premier cycle. Le conseil d’administration de l’ASWM a donc été largement renouvelé, ce qui crée une nouvelle impulsion.

Quels sont les projets de l'ASWM ?

Nous réfléchissions à un projet de mutualisation des demandes en private equity. Typiquement, tout le monde veut en faire mais les tickets d’entrée pour entrer dans certains fonds étant élevés, il est souvent difficile d’y accéder individuellement. De plus, nous sommes en train de développer une plateforme d’onboarding client pour tous nos membres, qui se sont mis d’accord sur les éléments clés et le cahier des charges, le tout en s’appuyant sur une blockchain. Ce sera ultra sécurisé et permettra au client d’entrer ses données, ses documents et de signer de manière électronique.

Quels sont les principaux défis à relever pour les membres de l'ASWM ?

Les questions réglementaires prennent une place prépondérante. Les gérants doivent en l’occurrence obtenir la licence LSFin (loi fédérale sur les services financiers) d’ici à la fin de l’année, qui contient les règles de comportement que les prestataires de services financiers doivent respecter vis-à-vis de leurs clients, et oblige, pour tous les acteurs fournissant leurs services en Suisse, de s’affilier à un organisme de surveillance ainsi qu’un organe de médiation.

Quelle est la place des femmes dans la gestion de fortune en Suisse ?

C’est un secteur encore extrêmement masculin. Les banques et les grandes institutions font très attention à ce sujet depuis quelques années, car elles en ont les moyens et surtout l’obligation. Au niveau des gérants indépendants, cela reste encore embryonnaire. C’est une opportunité pour les femmes et j’encourage toutes les femmes à saisir cette chance. Il y a dix ans, être une femme pouvait plutôt constituer un désavantage dans le monde de la finance. Aujourd’hui, je suis souvent abordée pour intégrer des boards de sociétés, non seulement pour l’expérience que j’ai acquise en 25 ans de carrière mais probablement aussi car je suis une femme. C’est un avantage indéniable.

Souhaitez-vous accueillir plus de membres au sein de l’Alliance ?

Nous en avons beaucoup débattu, et ne voulons pas grandir trop vite pour garder ces interactions, ces échanges de qualité intacts. Avoir plus de membres nous permettra néanmoins de partager davantage de know-how, d’idées, de réseau et de représenter une plus grande force sur le marché. Et au vu du nombre de sociétés qui souhaitent nous rejoindre, on sent que cet objectif résonne auprès des gérants indépendants.

Propos recueillis par Marc Munier

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