Le 28 mars se tiendra la soirée Ukraine Urgence & Démocratie organisée par Leaders League au bénéfice du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, de Reporters sans Frontières et du Groupe SOS. Paolo Artini, représentant de l’UNHCR en France, sera présent : il veut encourager tous les acteurs, et notamment les entreprises, à participer à l’élan de solidarité en faveur de l’Ukraine. Face à une crise qui ne fait peut-être que commencer, l’accueil et la protection des populations sont essentiels.

Décideurs. Vous avez accepté de participer à la soirée Urgence Ukraine & Démocratie organisée par Leaders League lundi prochain. Quel serait votre message aux participants ?

Paolo Artini. Je suis très heureux d’y participer. Cet événement est un signe de l’engagement de tout le monde, États, entreprises, citoyens, dans une crise qui est inédite. On dénombre 3,5 millions de réfugiés depuis le début il y a un mois, ce qui n’était pas arrivé depuis la Seconde Guerre mondiale. À l’intérieur de l’Ukraine aussi, les déplacements sont massifs. Il faut que l’on s’engage, toutes et tous, pour soutenir les populations vulnérables et les civils. Pour les aides, les moyens sont nombreux : le soutien financier, bien sûr, car les besoins humanitaires sont importants, mais également le soutien à l’accueil et à l’inclusion des réfugiés.

Sur ces points, je voudrais souligner un acteur très important : le secteur privé. Les entreprises et les fondations nous ont vraiment soutenus et veulent aider. C’est primordial, pas seulement pour les besoins humanitaires – produits de première nécessité, etc. – mais aussi pour l’assistance, à travers des programmes d’accès à des liquidités, de rénovation de centres… L’engagement du secteur privé est prometteur et indispensable, parce qu’il ne suffit pas d’accueillir les réfugiés. Il faut les inclure, car la crise va peut-être durer. Les perspectives d’accès à l’éducation et à l’emploi sont des facteurs essentiels pour leur permettre de retrouver une vie stable et aussi normale qu’elle puisse l’être dans leur pays d’accueil, avant de pouvoir, un jour, rentrer en Ukraine.

"Chaque effort compte pour la protection et l’accueil des Ukrainiens."

Que pensez-vous des mesures de solidarité mises en place partout dans le monde – et en Europe plus particulièrement – et de l’accueil des réfugiés ?

Il y a eu un élan de solidarité très important dès le début de la crise. La Pologne par exemple a déjà accueilli plus de 2 millions de personnes. Sous la présidence française de l’Union européenne, l’Europe a activé, pour la première fois – c’est une décision historique –, la directive sur la protection temporaire. Elle permettra de protéger des millions de personnes, et nous saluons cette décision. Désormais, il faut qu’elle soit rapidement appliquée, et de façon inclusive. Au niveau des États, des associations, des individus… Chaque effort compte pour la protection et l’accueil des Ukrainiens.

Ceux qui fuient l’Ukraine sont surtout des femmes et des enfants. Ce sont des populations vulnérables. Que fait le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés pour elles ?

Il faut noter une très grande mobilisation pour leur protection, à l’intérieur des frontières de l’Ukraine d’abord. Les déplacés internes sont eux aussi exposés à des risques de violence liés au genre et ont besoin de soutien psychologique. Pour les réfugiés, c’est pareil. Nous avons identifié tout de suite un risque de traite et d’exploitation des populations. Il faut informer et alerter, afin que tout le monde reste vigilant. Les femmes jeunes sont particulièrement concernées, car les familles sont souvent séparées à la frontière. Les enfants aussi, et il faut, avant de prendre une décision, s’assurer de respecter l’intérêt supérieur de l’enfant. Nous avons, par exemple, développé des centres pour les enfants et les familles, les Blue Dots. Ce sont des lieux sûrs, ouverts dans six pays frontaliers, pour travailler de façon inclusive entre les Nations unies, HCR, l’Unicef, les associations et les États afin d’identifier les soutiens nécessaires et d’orienter les enfants vers des structures de protection de l’enfance. On a aussi développé des campagnes pour les victimes de traite, Stay Safe, dans plusieurs pays, notamment la France.

"Tout ce que nous faisons pour les Ukrainiens, il faudrait le faire pour tous les réfugiés, partout dans le monde." 

Depuis le début de la guerre, quels manquements au droit international pouvons-nous relever ? Qu’attendre des décisions de la Cour internationale de justice ou de la Cour pénale internationale ?

Il y a deux sujets fondamentaux. D’un côté, les civils ne devraient jamais être l’objet d’attaques.  Ils devraient pouvoir accéder à la sécurité, bénéficier d’un passage sûr vers des lieux sûrs, à l’intérieur du pays ou ailleurs. L’autre aspect est celui de l’accès de l’aide humanitaire, grâce aux convois d’assistance aux populations vulnérables, encerclées, sans électricité, sans eau ni nourriture. Sur ces deux sujets, il y a beaucoup à faire. Comme l’a rappelé récemment le secrétaire général des Nations unies, nous assistons à des attaques contre les civils, des destructions, des déplacements de population, des souffrances. Le droit international humanitaire et des réfugiés prévoit la protection des civils et des réfugiés. Nous espérons que des solutions puissent être trouvées, sur la base du droit et des valeurs des Nations unies.

Cet élan de solidarité pour l’Ukraine pourrait-il s’étendre à d’autres réfugiés ?

Pour l’Ukraine, il faut déjà saluer l’important mouvement de solidarité et veiller à ce que cet élan s’inscrive dans la durée. Mais cette solidarité devrait s’étendre à tous les réfugiés, de tous les pays. Il y a d’autres crises, en Afghanistan, au Yémen, en Éthiopie… Nous espérons que cette compréhension de la cause des réfugiés, cette empathie continueront de s’exprimer de différentes façons selon les possibilités de chaque acteur. Tout ce que nous faisons pour les Ukrainiens, il faudrait le faire pour tous les réfugiés, partout dans le monde. La rencontre avec les réfugiés, leur accueil peuvent changer des vies. Il faut préserver les droits humains.

Propos recueillis par Olivia Fuentes

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Cette soirée se déroulera le lundi 28 mars au Pavillon d’Armenonville à Paris de 18h30 à 22h30.

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