Éric Dupond-Moretti, "Acquittator" au ministère de la Justice
Fils unique d’Elena Moretti et de Jean-Pierre Dupond, Éric Dupond-Moretti est élevé par sa mère après avoir perdu son père à l’âge de 4 ans. Il passe son enfance dans le nord de la France et c’est à 15 ans que naît sa vocation d’avocat lorsqu’il entend à la radio l’annonce de l’exécution de Christian Ranucci, condamné à mort pour l’enlèvement et l’assassinat d’une petite fille à Marseille. Les conditions suspectes du décès de son grandpère maternel, immigré italien, survenu en 1957, l’ont également convaincu d’endosser la robe. Il exprimera plus tard dans son livre Directs du droit être devenu avocat par "détestation de la peine de mort".
Une carrière ponctuée par les acquittements
Le 11 décembre 1984, Éric Dupond-Moretti prête serment comme avocat à Douai et s’inscrit au barreau de Lille. Il commence sa carrière aux prud’hommes, puis exerce comme avocat commis d’office avec pour mentors l’avocat lillois Jean Descamps et l’avocat toulousain Alain Furbury. En 2016, après trente ans au barreau de Lille, il s’inscrit au barreau de Paris et fonde son cabinet avec Antoine Vey rencontré trois années auparavant. L’Homme du Nord est surtout connu pour ses nombreux acquittements obtenus dans des procès très médiatisés, ce qui lui vaudra son surnom d’ "Acquittator".
En 1993, il défend Jacques Glassmann, alors joueur du club de football de Valenciennes, qui avait révélé avoir reçu une somme d’argent contre sa promesse de laisser gagner l’OM, mais qui sera finalement acquitté. Éric Dupond-Moretti a également obtenu l’acquittement de Roselyne Godard dans l’affaire d’Outreau, celui de Jean Castela, commanditaire présumé du meurtre du préfet dans le procès Érignac ainsi que celui de Jacques Viguier, accusé du meurtre de sa femme. Il a également obtenu l’acquittement de Georges Tron, l’homme politique accusé de viols et d’agressions sexuelles en réunion en 2018. Autant de dossiers médiatiques qui ont fait sa réputation de ténor du barreau.
De ténor du barreau à garde des Sceaux
Le 6 juillet 2020, l’homme de 59 ans est nommé garde des Sceaux et ministre de la Justice du gouvernement de Jean Castex, succédant ainsi à Nicole Belloubet. Un mois plus tard, lors de la cérémonie de passation de pouvoir Place Vendôme, le nouveau ministre de la Justice promet de faire de son ministère "celui de l’antiracisme et des droits de l’homme" et plaide pour une réforme ambitieuse de la justice. Parmi ses priorités figurent la lutte contre les violences conjugales, la fermeté face au terrorisme, la réforme du parquet ayant pour objectif de voir les procureurs nommés, comme les juges, sur avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature ainsi que la réforme de la justice des mineurs. Éric Dupond-Moretti affirme également vouloir une justice filmée et diffusée : "La publicité des débats est une garantie démocratique" a-t-il déclaré au journal Le Parisien. Certains magistrats ont fermement critiqué ce projet, dont notamment Céline Parisot, la présidente de l’Union syndicale des magistrats, qui s’est exprimée à ce sujet : "Le ministre devrait d’abord nous donner les moyens de faire correctement notre travail avant de faire des annonces aussi ridicules. La justice mérite d’être rendue sereinement, or, là, c’est la justice spectacle qu’on promeut."
En l’espace de quelques mois, "Acquittator" a déjà pris d’importantes mesures. L’une d’elles est son choix de nommer l’avocate Nathalie Roret à la tête de l’École nationale de la magistrature le 21 septembre 2020. Cette nomination fait d’elle la première femme avocate dirigeant l’école de formation des magistrats de l’ordre judiciaire français.