Un chiffre d’affaires en croissance, l’ouverture de trois nouveaux bureaux et plus de 2 000 avocats répartis dans le monde : Allen & Overy, quatre-vingts ans d’exercice en 2010, confirme sans mal sa place parmi les dix premiers cabinets mondiaux.
Vu de l’extérieur, la crise glisse sur Allen & Overy comme de l’eau sur le dos d’un canard. Avec une présence globale assurée par 39 bureaux, 40 au printemps prochain, et un chiffre d’affaires de plus de 1 730?millions de dollars, la firme internationale continue de parfaire son empire. Vu de l’intérieur, le géant fait preuve d’une extrême rigueur dans son organisation et d’un calme réfléchi dans la prise de décision.

Une réputation fondée sur les services bancaires
Allen & Overy, l’un des cabinets les plus anciens de la City, a forgé sa renommée dans le secteur financier. Au Royaume-Uni, la pratique droit bancaire et financier est full service (capital market, produits dérivés et structurés, finance islamique, projets immobiliers, etc.) avec l’intervention de plus de cent dix associés répartis entre les deux bureaux de Londres et celui de Belfast. L’équipe conseille et accompagne les plus prestigieux établissements bancaires comme la Banque de Tokyo-Mitsubishi, le management de Barclays Capital, Goldman Sachs et HSBC, la Bank of New Zealand, la Royal Bank of Canada, la Royal Bank of Scotland, etc. Les dossiers sont imposants, avec de nombreuses transactions supérieures à 500?millions de livres sterling.
Dans sa démarche de globalisation, le cabinet utilise le secteur bancaire pour intégrer les autres matières afin d’équilibrer les practices. Cette stratégie mise en place à Londres est reproduite à l’échelon mondial. C’est le cas du bureau parisien qui, d’une forte réputation en droit bancaire et financier lors de son installation, tend efficacement vers une palette de compétences complète et solide (lire l’encadré pages suivantes).

Cette forte notoriété en droit bancaire et financier a une incidence sur la politique d’avancement des avocats. Comme l’explique Jean-Claude Rivalland, managing partner du bureau de Paris : «?La clientèle de banques et d’institutions financières nécessite un suivi sur le long terme. C’est une practice pour laquelle nous privilégions les cooptations. Nous valorisons ainsi les performances tout en facilitant les contacts externes.?» C’est ainsi que Brice Henry, qui intervient en matière de fonds et de regulatory financier, a été promu associé du bureau parisien en mai?2011.

2011 : de nouvelles destinations
La stratégie de croissance globale du cabinet est affirmée. Après Sydney, Perth et Jakarta en 2010, Allen & Overy a frappé fort en 2011 en ouvrant trois nouveaux bureaux. Un quart de siècle après son implantation aux États-Unis, la firme traverse à nouveau l’Atlantique et prend la direction de la capitale des États-Unis, Washington DC. Le bureau a ouvert ses portes au mois de juillet grâce à l’arrivée de trois associés en provenance du cabinet américain O’Melveny & Myers : Barbara Stettner, Chris Salter et Charles Borden. David Slade, associé à New York, a pris la direction du bureau. L’équipe devrait être renforcée par quelques-uns des 175 avocats new-yorkais. L’activité à Washington DC est focalisée sur la régulation à travers l’accompagnement des institutions financières.

L’Afrique, quant à elle, fait l’objet d’une grande attention depuis de nombreuses années en raison d’une forte activité tournée vers le financement de projet et un développement accru de la practice arbitrage international. L’heure de s’y installer était venue. Le bureau marocain d’Allen & Overy a vu le jour en juillet avec la délocalisation d’un associé et l’arrivée de trois nouveaux avocats. François Duquette, expert en banque et finance, était basé à Abu Dhabi. Philippe de Richoufftz et Yassir Ghorbal sont tous les deux des anciens du géant français Gide Loyrette Nouel. Ils ont été rapidement rejoints par Hicham Naciri, ex-Gide également, qui a pris la direction du nouveau bureau. La conquête du marché maghrébin est féroce : au même moment, Clifford Chance et Norton Rose ont suivi le même chemin.
En novembre enfin, Allen & Overy a annoncé son intention de poser sa plaque dans la capitale turque. Charles Lindsay, associé du bureau de Londres, pilotera à partir du printemps 2012 l’activité de droit anglais et international orienté vers le financement de projet, les marchés de capitaux et le M&A.

Des obstacles surmontés brillamment
Pour connaître les clés du succès de la firme, il faut se pencher sur son passé. La vie du cabinet est en effet marquée par des événements auxquels il n’est pas inutile de faire référence. Sa naissance aurait pu être placée sous de mauvais auspices. Tom Overy et George Allen s’associent le 1er?janvier 1930, au lendemain du krach de 1929. Mais la crise ne les atteint pas. Très rapidement, l’expertise des deux associés se fait connaître et en 1936, George Allen conseille Édouard VII pris dans les méandres de son abdication. Le cabinet sort de la Seconde Guerre mondiale la tête haute, avec un chiffre d’affaires de 100 000?livres sterling en 1947 (l’équivalent de 275 000?livres d’aujourd’hui). Mais en 1952, les associés fondateurs se disputent sur les modalités de leur retraite, à tel point qu’ils n’échangent plus que par courrier. En 1953, George Allen se retire définitivement et en 1960, hospitalisé, Tom Overy tire sa révérence. Il décédera treize ans plus tard. Dans les années 1960, le cabinet reste identifié comme l’un des quatre principaux de la City par les observateurs de l’époque. Un trio d’associés prend les rênes de la firme : Godfrey Morley, Willie Martin et Jim Thomson. Ils font preuve d’un réel leadership pour tirer les avocats vers plus de performance et les préparer à la mutation de leurs métiers : des professionnels à l’écoute du monde de l’entreprise très spécialisés et capables d’anticiper les besoins des clients.
Cette démarche d’adaptation et d’anticipation est reproduite à chaque phase de l’évolution du cabinet, comme lorsque le cabinet explose ses effectifs et son chiffre d’affaires entre 1985 et 2000. La firme a ainsi surmonté la crise des banques de 2008 en procédant certes à des licenciements (le cabinet a perdu environ 10?% de ses effectifs, dont cinquante associés), mais surtout en restant attachée à un système de pur lockstep, sur quinze ans et à cinquante points. Ce mode de rémunération des associés par paliers, souvent privilégié par les cabinets anglais, induit l’égalité des associés à chaque stade d’ancienneté. Il facilite donc le partage de l’excellence professionnelle et la cohésion du groupe. Ce système va de pair avec l’institution d’un management multinational. La direction globale de la firme est ainsi assurée par deux associés, David Morley, senior partner britannique, et Wim Dejonghe, managing partner monde, de nationalité belge. De la même manière, sont présents au board des représentants des fonctions comptables ou ressources humaines du cabinet.

Force d’internationalisation
Ces trois dernières années, c’est-à-dire depuis la nomination de David Morley au rang de senior partner, Allen & Overy a ouvert onze nouveaux bureaux. C’est la firme du Magic Circle la plus active en termes d’internationalisation. Près de 60?% des revenus du cabinet sont réalisés hors des frontières du Royaume-Uni et les deux tiers de son activité portent sur des dossiers couvrant plusieurs pays à la fois. Cette force tient à la politique de globalisation multiforme. Allen & Overy ne se contente pas d’une unique démarche expansionniste. Ses projets de création de nouveaux bureaux se réalisent aussi bien par absorption d’une structure locale que par constitution d’une nouvelle équipe. De plus, elle adapte ses ambitions aux contraintes locales en multipliant les formes de partenariats. En Inde par exemple, où le marché est très fermé, la réglementation très sévère et les law firms indiennes très nombreuses, le cabinet travaille en partenariat avec un cabinet local. Pour le moment, les clients ne réclament pas d’implantation ferme dans le pays. En parallèle, un réseau très complet de best friends a été structuré. Grâce à des rencontres deux fois par an, les contacts sont particulièrement productifs en Afrique avec des correspondants dans plus de cinquante pays du continent.

L’Europe, le moteur
La conquête de l’Europe, plus ancienne, a quant à elle été lente et réfléchie. La démarche a été de passer d’un cabinet international qui pratique exclusivement le droit anglais à une véritable firme globale intégrée dans les régions. C’est le chemin suivi en France ou en Allemagne par exemple, où les bureaux sont progressivement devenus des équipes autonomes dotées d’un portefeuille de clients locaux. Au Benelux ou en Italie en revanche, la firme a choisi de s’implanter directement en absorbant les cabinets Loeff Claeys Verbeke et Brosio Casati e Associati, qui, en 1998, permettent à la firme de devenir un acteur majeur dans ces pays. En soutien de Londres, les implantations européennes sont maintenant solides et dispensent des services complets. Leur rentabilité est d’ailleurs supérieure à la moyenne de l’ensemble des bureaux.
Ce socle est fondamental pour faire face aux nouveaux défis issus de la globalisation. Allen & Overy est conscient de la concurrence accrue des cabinets originaires des nouveaux pays émergents qui s’organisent et s’affirment de plus en plus sur le marché. Les cabinets chinois ou indiens montrent leur intérêt croissant à la fois pour leurs places financières locales et pour le développement de leur activité sur le sol britannique – depuis la loi britannique Legal Service Act 2007 sur l’ouverture du marché des services juridiques, des prestataires non-avocats peuvent proposer des services juridiques. La stratégie de la firme pour rester au sommet des cabinets d’avocats d’affaires globaux est de conserver l’Europe continentale au cœur du réacteur comme moteur de la machine Allen & Overy. À un tel stade de développement, la difficulté se situe donc du côté des effectifs.

De nombreuses initiatives
Améliorer l’intégration des collaborateurs est un des objectifs premiers de la firme. «?Notre talent dépend des talents de demain?», insiste Jean-Claude Rivalland. Pour cela, le cabinet valorise les actions en faveur de la cohésion du groupe. Cet investissement passe par plusieurs types d’initiatives comme la mise en valeur des femmes (elles ne représentaient fin 2010 que 16?% du partnership) et la participation aux actions bénévoles. Le pro bono est une valeur placée au cœur de l’activité d’Allen & Overy. Membres d’une firme internationale, les avocats prennent une part active pour le développement de leur environnement.

En 2008 a été créé un groupe de travail sur la microfinance auquel participent plus de deux cents avocats dans plus de vingt bureaux différents. Allen & Overy Paris soutient ainsi Planet Finance, une organisation de solidarité internationale d’aide à la mise en place d’organismes de microfinance dans les pays les plus pauvres. À Londres, une équipe dédiée au Rwanda a été constituée afin d’aider les acteurs du monde judiciaire à reconstituer un système juridique dans le pays suite au génocide du début des années 1990. À Paris, le pro bono sera certainement renforcé avec l’arrivée de Denis Chemla, président de Droits d’urgence, une association qui favorise depuis 1995 l’accès au droit des plus démunis. L’équipe parisienne participe ainsi activement au bus de la solidarité deux fois par mois.

Un avenir assuré
Dans le même temps, David Morley offre une perspective d’évolution du cabinet face aux nouveaux enjeux économiques et politiques. Il énumère six grandes tendances pour le futur : la mondialisation, la concurrence accrue, l’industrialisation du droit, la bataille pour les esprits les plus brillants, la technologie et enfin la conservation d’une marque forte. En 2010, le senior partner était «?persuadé que le cabinet (pourra) surmonter tous les défis et toutes les conjonctures économiques qui se présenteront à lui?». Avec trois nouveaux bureaux en 2011 et un chiffre d’affaires en croissance, l’histoire récente lui donne raison : tous les voyants sont au vert.

Lire : L'envol du bureau parisien d'Allen & Overy



Prochains rendez-vous

02 octobre 2024
Sommet du Droit en Entreprise
La rencontre des juristes d'entreprise
DÉJEUNER ● CONFÉRENCES ● DÎNER ● REMISE DE PRIX

Voir le site »

02 octobre 2024
Rencontres du Droit Social
Le rendez-vous des acteurs du Droit social
CONFÉRENCES ● DÉJEUNER  

Voir le site »

Newsletter Flash

Pour recevoir la newsletter du Magazine Décideurs, merci de renseigner votre mail

{emailcloak=off}

GUIDE ET CLASSEMENTS

> Guide 2024