Nombreuses sont les restructurations menacées d’échec par des conflits sociaux . Quelques bonnes pratiques peuvent pourtant faciliter la réussite d’un plan de sauvegarde de l’emploi socialement responsable.
Nombreuses sont les restructurations d’entreprises menacées d’échec par les conflits sociaux forts qu’elles engendrent. Quelques bonnes pratiques peuvent pourtant faciliter la réussite d’un plan de sauvegarde de l’emploi socialement responsable.

Recours à l’externalisation, réduction de la taille des équipes, spin-offs d’activités non stratégiques, cession d’actifs… En période de crise, les leviers d’ajustement possibles pour adapter les effectifs des entreprises à leurs besoins réels sont nombreux. Le plus radical, qui consiste à fermer définitivement un atelier de production ou un site industriel, se traduit par la mise en œuvre d’un plan de sauvegarde de l’emploi. Or, ce type d’opération finit presque immanquablement par affecter lourdement le climat social de l’entreprise.

Difficile en effet pour le dirigeant d’une société en difficulté de trouver le temps nécessaire à une prise en compte adéquate des enjeux liés aux ressources humaines lors de la restructuration d’une entreprise, d’un site ou d’une activité : les aspects bancaires, financiers, la relation avec les fournisseurs et les investisseurs passent souvent au premier plan. Pourtant, les cas de séquestrations de patrons qui se sont succédé depuis 2009 (de Sony à 3M en passant par Caterpillar) montrent bien à quel point une mauvaise gestion des aspects humains peut conduire au blocage.

Rien ne sert de courir

Est-ce le fait de l’héritage syndical français, de politiques parfois interventionnistes du gouvernement ou encore d’une surmédiatisation à charge ? Quoi qu’il en soit, la crainte d’entrer en guerre ouverte avec les salariés peut décourager bien des patrons de mettre en place des ajustements de la masse salariale, quand bien même ceux-ci seraient absolument nécessaires à la préservation de la compétitivité de l’entreprise. Les situations de blocage ralentissent en effet le processus de réorganisation, le rendant plus coûteux, mais ont surtout des effets désastreux sur l’image de l’entreprise auprès du grand public.

Quelques règles simples permettent pourtant de minimiser les risques de crise sociale. Premier piège à éviter : la tentation de la précipitation. Bien qu’il faille parfois agir dans l’urgence, il est indispensable de prendre le temps de planifier les opérations en commençant par en déterminer les objectifs. Aux dirigeants ensuite de prendre les renseignements nécessaires concernant l’environnement légal et les pratiques sociales, lorsqu’ils n’en sont pas familiers - ce qui peut être le cas, par exemple, pour des sociétés étrangères implantées en France. Alors seulement peut intervenir la préparation des nombreux éléments administratifs et financiers, des modalités d’indemnisation et de reclassement… mais surtout de l’information à communiquer.

Communiquer pour mieux réorganiser

Ce dernier point est essentiel : une grande partie de la réussite des restructurations dépend de la qualité de la communication qui les entoure. Communication aux représentants du personnel d’abord (comité d’entreprise, CHSCT…), dans le respect des procédures prévues. Mais ceux-ci ne sont pas les seuls interlocuteurs concernés. Il faut aussi fournir directement une information claire et argumentée au management et aux collaborateurs, afin d’éviter la propagation de rumeurs incontrôlées nées de l’incompréhension et des inquiétudes des salariés. Autre levier d’action : penser à associer pouvoirs publics, responsables politiques et médias afin de s’assurer que l’information ne soit pas relayée auprès du grand public de manière systématiquement négative.

C’est donc un véritable plan de communication, régulier et transparent qui doit être mis en œuvre, tant pour éviter la judiciarisation galopante des procédures de restructuration que la dégradation de l’image de l’entreprise concernée. Rappelons, dans ce contexte, que la quasi-totalité des projets de restructuration ou de réorganisation finissent en réalité par aboutir. À modalités techniques égales, les différences de coûts et de délais que l’on peut constater d’un plan à l’autre varient justement en fonction de l’ampleur des dommages collatéraux générés par une plus ou moins bonne gestion des aspects humains. De quoi s’interroger sur l’opportunité de considérer les plans de sauvegarde à travers le prisme de la responsabilité sociale, comme l’a fait en 2008 le groupe de travail du rapport IRENE (cf. encadré).


Les six clés d’une restructuration socialement responsable selon le rapport Irene

Innovative Restructuring – European Networks of Experts (Irene) est un projet européen, coordonné par l’Association travail emploi europe société (Astrees). Il a produit des conclusions et des propositions pratiques pour les restructurations socialement reponsables :

- Établir la légitimité du changement en s’appuyant sur des outils de communication interne et externe ;

- Repenser les critères de sélection, ainsi que les procédures décisionnelles, en envisageant des mesures sociales pour tous, quelle que soit la forme de l’emploi occupé ;

- Aménager des périodes de transition pour les individus et les territoires, afin de responsabiliser les salariés et les instances de dialogue social ;

- Élargir le dialogue social aux nouvelles formes de travail grâce à de nouvelles instances de dialogue, de nouveaux acteurs et davantage de ressources ;

- Faire de la santé un nouveau domaine de responsabilité, incluant davantage de justice sociale, et un suivi de l’impact sanitaire en cas de restructuration ;

- Mettre en place des politiques paneuropéennes en matière de restructurations incluant un code de conduite européen et une révision des financements européens ;

- Développer une gestion pluridisciplinaire des restructurations afin de parvenir à des transitions réussies pour les individus, les entreprises et les territoires.

Source: rapport final Irene, “Socially responsible restructuring in the context of the present crisis”, 2008


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