Par Jérôme Margulici, avocat, Capstan Avocats
Faut-il désormais reconnaître le vote blanc dans les élections professionnelles ?
Le droit des élections professionnelles a subi quelques évolutions durant l’année 2014. Celles-ci sont principalement issues de la loi du 5 mars (L. n°2014-288, 5 mars 2014, JO 6 mars) dont on retiendra en particulier qu’elle a entériné plusieurs solutions dégagées par la Cour de cassation portant sur les conditions de validité du protocole préélectoral ou les effets de la saisine de l’autorité administrative sur les mandats en cours.
La loi du 21 février 2014 visant à reconnaître le vote blanc aux élections (L. n° 2014-172, 21 février 2014, JO 6 février) est, quant à elle, passée relativement inaperçue. À cela, rien d’étonnant puisqu’elle ne concerne pas spécifiquement les élections professionnelles ; aucune de ses dispositions n’a d’ailleurs modifié un quelconque article du Code du travail. Son extrême brièveté (quatre articles) peut encore expliquer le peu d’écho dont elle a fait l’objet.
Pourtant, cette loi mérite que les responsables des ressources humaines s’y attardent dans la perspective des prochaines élections qui se dérouleront au sein de leur entreprise.
L’objectif de cette loi, entrée en vigueur le 1er avril, est de remédier à l’assimilation du vote blanc à un vote nul dans la mesure où, pour beaucoup de citoyens, il constitue une forme d’expression politique à part entière. Afin de reconnaître pleinement le vote blanc et de n’en plus faire une simple variante du vote nul, l’article 1er de la loi a notamment modifié l’article L.65 du Code électoral et lui a ajouté l’alinéa suivant :
« Les bulletins blancs sont décomptés séparément et annexés au procès-verbal. Ils n’entrent pas en compte pour la détermination des suffrages exprimés, mais il en est fait spécialement mention dans les résultats des scrutins. »
Si la vocation première du Code électoral est de régir le droit des élections politiques (et non professionnelles), il s’avère que, lorsque le Code du travail est muet ou insuffisamment précis pour trancher un litige, la Cour de cassation y puise des règles qu’elle applique au déroulement des élections professionnelles.
Le non-respect de ces règles, qualifiées par la jurisprudence de « principes généraux du droit électoral », peut, à lui seul, justifier l’annulation des élections.
Ainsi, certaines dispositions de l’article L.65 du Code électoral ont déjà été invoquées avec succès à l’appui d’actions en invalidation d’élections professionnelles (par exemple : Cass. soc., 20 octobre 1999, n° 98-60359 : le président du bureau de vote constate publiquement l'heure de clôture du scrutin et le dépouillement, sous le contrôle des délégués des listes de candidats, est fait par les scrutateurs désignés parmi les électeurs ; Cass. soc., 23 mai 2000, n° 98-60526 : le scrutin doit se dérouler dans des conditions identiques pour l'ensemble du corps électoral, et sans interruption, à la date fixée pour les élections, entre l'heure d'ouverture et l'heure de clôture du scrutin).
Est-ce à dire que le décompte distinct des bulletins blancs et sa mention sur le procès-verbal des élections prévus par la loi du 21 février 2014 sera désormais érigé en « principe général du droit électoral » ?
On pourrait en douter si l’on conçoit ces « principes généraux » comme étant uniquement destinés à assurer la liberté et la sincérité du scrutin, objectifs auxquels le nouvel alinéa de l’article L.65 ne concourt pas directement.
La prudence invite pourtant à s’y conformer en précisant sur le procès-verbal le nombre de bulletins blancs.
À cet égard, on rappellera pourtant qu’en l’état actuel, les formulaires Cerfa disponibles sur le site internet dédié (www.elections-professionnelles.travail.gouv.fr) et utilisés par l’immense majorité des entreprises comportent uniquement une rubrique dans laquelle doit être indistinctement mentionné le nombre de « bulletins blancs ou nuls ».
Cet argument serait toutefois inopérant dans le cadre d’un litige en annulation des élections et l’entreprise qui, de bonne foi, plaiderait avoir scrupuleusement complété l’ensemble des informations figurant sur le formulaire administratif ne pourrait espérer aucune clémence des juges.
En effet, dans un arrêt récent, la Cour de cassation a confirmé l’annulation d’élections professionnelles, faute pour le président du bureau de vote d’avoir mentionné sur le procès-verbal les heures d’ouverture et de clôture du scrutin alors même qu’une telle information – si elle est bien envisagée par le Code électoral (article R.57) – est absente du document fourni par l’administration (Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-21680).
Il n’est aucunement interdit d’ajouter des mentions à celles prévues par le formulaire Cerfa. En attendant – peut-être vainement – que l’administration ne les complète, il conviendra au rédacteur du procès-verbal d’ajouter ces mentions de façon manuscrite en faisant figurer sur deux lignes distinctes le nombre de bulletins nuls d’une part et de bulletins blancs d’autre part.
En tout état de cause, on précisera que cette loi n’a aucun impact sur la mesure de l’audience électorale des organisations syndicales servant notamment à déterminer leur représentativité. En effet, seuls sont pris en compte les suffrages exprimés, dont la loi du 21 février rappelle expressément que les votes blancs demeurent exclus.
La loi du 21 février 2014 visant à reconnaître le vote blanc aux élections (L. n° 2014-172, 21 février 2014, JO 6 février) est, quant à elle, passée relativement inaperçue. À cela, rien d’étonnant puisqu’elle ne concerne pas spécifiquement les élections professionnelles ; aucune de ses dispositions n’a d’ailleurs modifié un quelconque article du Code du travail. Son extrême brièveté (quatre articles) peut encore expliquer le peu d’écho dont elle a fait l’objet.
Pourtant, cette loi mérite que les responsables des ressources humaines s’y attardent dans la perspective des prochaines élections qui se dérouleront au sein de leur entreprise.
L’objectif de cette loi, entrée en vigueur le 1er avril, est de remédier à l’assimilation du vote blanc à un vote nul dans la mesure où, pour beaucoup de citoyens, il constitue une forme d’expression politique à part entière. Afin de reconnaître pleinement le vote blanc et de n’en plus faire une simple variante du vote nul, l’article 1er de la loi a notamment modifié l’article L.65 du Code électoral et lui a ajouté l’alinéa suivant :
« Les bulletins blancs sont décomptés séparément et annexés au procès-verbal. Ils n’entrent pas en compte pour la détermination des suffrages exprimés, mais il en est fait spécialement mention dans les résultats des scrutins. »
Si la vocation première du Code électoral est de régir le droit des élections politiques (et non professionnelles), il s’avère que, lorsque le Code du travail est muet ou insuffisamment précis pour trancher un litige, la Cour de cassation y puise des règles qu’elle applique au déroulement des élections professionnelles.
Le non-respect de ces règles, qualifiées par la jurisprudence de « principes généraux du droit électoral », peut, à lui seul, justifier l’annulation des élections.
Ainsi, certaines dispositions de l’article L.65 du Code électoral ont déjà été invoquées avec succès à l’appui d’actions en invalidation d’élections professionnelles (par exemple : Cass. soc., 20 octobre 1999, n° 98-60359 : le président du bureau de vote constate publiquement l'heure de clôture du scrutin et le dépouillement, sous le contrôle des délégués des listes de candidats, est fait par les scrutateurs désignés parmi les électeurs ; Cass. soc., 23 mai 2000, n° 98-60526 : le scrutin doit se dérouler dans des conditions identiques pour l'ensemble du corps électoral, et sans interruption, à la date fixée pour les élections, entre l'heure d'ouverture et l'heure de clôture du scrutin).
Est-ce à dire que le décompte distinct des bulletins blancs et sa mention sur le procès-verbal des élections prévus par la loi du 21 février 2014 sera désormais érigé en « principe général du droit électoral » ?
On pourrait en douter si l’on conçoit ces « principes généraux » comme étant uniquement destinés à assurer la liberté et la sincérité du scrutin, objectifs auxquels le nouvel alinéa de l’article L.65 ne concourt pas directement.
La prudence invite pourtant à s’y conformer en précisant sur le procès-verbal le nombre de bulletins blancs.
À cet égard, on rappellera pourtant qu’en l’état actuel, les formulaires Cerfa disponibles sur le site internet dédié (www.elections-professionnelles.travail.gouv.fr) et utilisés par l’immense majorité des entreprises comportent uniquement une rubrique dans laquelle doit être indistinctement mentionné le nombre de « bulletins blancs ou nuls ».
Cet argument serait toutefois inopérant dans le cadre d’un litige en annulation des élections et l’entreprise qui, de bonne foi, plaiderait avoir scrupuleusement complété l’ensemble des informations figurant sur le formulaire administratif ne pourrait espérer aucune clémence des juges.
En effet, dans un arrêt récent, la Cour de cassation a confirmé l’annulation d’élections professionnelles, faute pour le président du bureau de vote d’avoir mentionné sur le procès-verbal les heures d’ouverture et de clôture du scrutin alors même qu’une telle information – si elle est bien envisagée par le Code électoral (article R.57) – est absente du document fourni par l’administration (Cass. soc., 16 octobre 2013, n° 12-21680).
Il n’est aucunement interdit d’ajouter des mentions à celles prévues par le formulaire Cerfa. En attendant – peut-être vainement – que l’administration ne les complète, il conviendra au rédacteur du procès-verbal d’ajouter ces mentions de façon manuscrite en faisant figurer sur deux lignes distinctes le nombre de bulletins nuls d’une part et de bulletins blancs d’autre part.
En tout état de cause, on précisera que cette loi n’a aucun impact sur la mesure de l’audience électorale des organisations syndicales servant notamment à déterminer leur représentativité. En effet, seuls sont pris en compte les suffrages exprimés, dont la loi du 21 février rappelle expressément que les votes blancs demeurent exclus.