Laura Cuenin-Renucci est directrice administrative et financière d’Emmaüs Défi, une association régie par la loi de 1901. Considérée comme une structure d’insertion pour l’activité économique (SIAE), elle vise à réinsérer dans la vie active des personnes qui connaissent la grande exclusion. Emmaüs Défi s’appuie sur un très large réseau privé de partenaires pour développer sa stratégie de croissance.
Laura Cuenin-Renucci (Emmaus Défi) : "Le DAF est une fonction support qui fait parler les chiffres"
Décideurs. Qu’est-ce qui vous plaît dans le métier de DAF ?
Laura Cuenin-Renucci. Ce qui me passionne au quotidien est de faire parler les chiffres, de leur donner du sens. Au-delà de la vision macroéconomique, j’aime apporter ma pierre à l’édifice, à mon niveau, pour parvenir à une société plus équitable. J’apprécie aussi de développer notre stratégie de croissance. Nous nous appuyons sur un très large réseau de partenaires privés qui procèdent à des dons en nature, en plus de dons financiers ou de mécénats de compétences. Des enseignes de renom comme les Galeries Lafayette, Carrefour, entre autres, contribuent à la réussite de notre association. L’intérêt pour ces grandes marques est simple : depuis la loi antigaspillage, les stocks invendus, les modèles d’exposition ou les fins de séries ne peuvent plus finir à la poubelle. Ces partenaires nous donnent donc leurs surplus. En échange, ils reçoivent un reçu fiscal pour obtenir une réduction d’impôts. La seconde main assure une seconde vie à des vêtements mais aussi à des meubles, de l’électroménager ou de la vaisselle. Ce qui me plaît, c’est de contribuer à une démarche RSE et d’avoir une approche en faveur de notre planète en réduisant l’empreinte carbone et les déchets du textile.
"En 2023, nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 3,6 millions d’euros avec cinq boutiques actives actuellement."
Selon vous, quelles sont les trois qualités indispensables à un bon directeur financier ?
Les trois qualités nécessaires pour exercer ce métier sont la rigueur, le dynamisme et la curiosité. La rigueur dans les analyses et les données du panel financier que requiert la profession. Le dynamisme pour l’entrain et l’importance d’embarquer toutes les équipes dans des projets sociaux à fort enjeu. La curiosité, enfin, pour rester à l’affût des dernières technologies et innovations afin de les insérer dans nos process et ainsi obtenir un gain de temps considérable.
Comment imaginez-vous le DAF de demain ?
Le DAF de demain devra avoir un profil multicasquette tout en gardant une approche transversale, sans négliger l’approche financière. Il doit être un bon communicant pour faire passer les messages aux différentes équipes et assurer une veille efficace en matière de data, d’IA et d’innovation. Dans notre cas, il doit aussi se reconnaître dans les projets sociaux car l’association est une structure juridique qui a du sens et où l’humain est au cœur de nos missions.
Quels sont vos objectifs de croissance ?
Nous souhaitons trouver des leviers de financement. En 2023, nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 3,6 millions d’euros avec cinq boutiques actives actuellement. Ces ressources s’ajoutent à nos mécénats privés et à nos subventions publiques, rendant nos financements très diversifiés, ce qui nous permet d’être plus indépendants financièrement. Nous avons dû avoir recours à un emprunt avec Paris Initiative Entreprise (PIE) en 2024 et les opportunités nouvelles de financement seront toujours les bienvenues. Ensuite, nous sommes toujours à la recherche d’espaces disponibles pour croître davantage. Pour cela, nous avons recours à des baux « précaires », qui sont des baux commerciaux de très courte durée. Nous continuons à développer notre pôle communication avec, notamment, une présence de plus en plus prononcée sur LinkedIn mais aussi sur TikTok, car la précarité touche tout le monde, y compris les jeunes étudiants. Enfin, notre message et celui d’Emmanuel Ravanas, notre président, toujours à la recherche de solutions contre l’exclusion, est de faire
disparaître cette précarité.
🔎 Parcours :
- 2008 : obtient un master finance internationale à la Skema Business School
- 2010 : intègre General Electric Money Bank (GEMB) comme comptable
- 2011 : devient contrôleur de gestion au sein de GEMB
- 2014 : évolue en tant que responsable des modèles et des données chez GEMB
- 2015 : enchaîne en tant que responsable projets Asset Management chez GEMB
- 2017 : est nommée chef de projet fusion-acquisition My Money Bank (groupe General Electric)
- 2019 : rejoint Enfants d’Asie en tant que responsable administratif et financier
- 2020 : devient DAF chez Emmaüs Défi
Propos recueillis par Laura Guetta Dray