Même si CIC Banque Privée s’est toujours positionnée sur le haut de gamme, avec des seuils d’éligibilité comparables à ceux des "pure players", la conquête de nombreux clients UHNWI l’a conduit à mettre en place une organisation et une offre spécifiques. Quant au statut revendiqué de banque privée du dirigeant d’entreprise, il reste plus que jamais d’actualité. Entretien avec Didier Simondet, directeur de CIC Banque Privée.
CIC Banque Privée : le Wealth Management, un axe stratégique majeur
Décideurs. Pouvez-vous nous décrire les principaux axes de votre stratégie de développement, notamment en ce qui concerne le segment UHNWI ?
Didier Simondet. CIC Banque Privée a de tout temps fondé son développement sur l’accompagnement des dirigeants et familles actionnaires des entreprises clientes ou non du CIC. Cet accompagnement porte non seulement sur la gestion privée des capitaux confiés mais également sur le conseil dans l’articulation entre patrimoine professionnel et patrimoine personnel. En permettant, notamment via le crédit, le développement de projets.
"Les dirigeants et familles dont le patrimoine global est supérieur à 50 millions d'euros exigent à la fois un véritable sur-mesure et une approche quasi institutionnelle"
Les dirigeants et familles, de plus en plus nombreux, dont le patrimoine global est supérieur à 50 millions d'euros, ceux que l’on appelle les UHNWI, nécessitent une approche encore différente : qu’ils soient ou non accompagnés par des family offices, ils exigent à la fois un véritable sur-mesure et une approche quasi institutionnelle, que ce soit en matière de reporting, de financements ou de services financiers. Nous avons donc décidé, en 2022, d’en faire un segment de clientèle distinct.
Comment vous êtes-vous adaptés pour répondre aux besoins spécifiques de cette clientèle ?
Fidèles à notre ancrage territorial, nous n’avons pas voulu créer un centre de gestion de fortune basé à Paris mais des départements Wealth Management au sein de chacune de nos six régions, constitués de banquiers privés consacrés à cette clientèle. Ce sont pour la plupart d’anciens directeurs d’agences banque privée dont l’expérience et la maturité sont parfaitement adaptées. Ils accompagnent chacun une trentaine de familles actionnaires et sont soutenus dans leur activité par une équipe centrale qui est à leur disposition pour leur fournir offres, outils, informations, capacité rédactionnelle ou agrégation de compétences. Ils s’adaptent aux demandes formulées spécifiquement par chaque client, pratiquent quotidiennement l’inter-professionnalité et ont une connaissance parfaite de l’environnement familial, actionnarial et territorial de leurs interlocuteurs.
Quelles innovations ou services proposez-vous pour vous démarquer ?
En matière d’offre, nous avons pris résolument le parti de fonctionner à double sens : nous proposons régulièrement des idées, des pistes de réflexion et des projets à notre clientèle "Wealth", qui ne seront mis en œuvre que s'il existe une marque d’intérêt. Notre culture d’architecture ouverte nous aide beaucoup sur ce point. Mais nous répondons également à des demandes ou des cahiers des charges et nous construisons alors une offre à partir de ces demandes. Cette offre sera ensuite, ou non, proposée à d’autres clients "wealth" : cet aller-retour permanent est, je crois, un gage de réussite pour ce segment de clientèle. Pour le reste, je connais la qualité et l’expertise de nos concurrents, souvent prestigieux : la différenciation se fera donc davantage par l’ancrage territorial, la capacité à répondre vite, la prise en charge des opérations du quotidien, et donc la proximité relationnelle. C’est vrai pour CIC Banque Privée en général, ça l'est encore plus pour notre activité Wealth Management.
Comment les secteurs de la banque privée et de la gestion de fortune ont-ils évolué au cours des dernières années, en particulier pour les UHNWI ?
Il est évident que le marché de la banque privée et de la gestion de fortune s’est profondément recomposé depuis quelques années, et ce n’est pas fini. En premier lieu, la transformation du métier lui-même : le double choc numérique et réglementaire a non seulement modifié en profondeur les pratiques mais aussi bouleversé les modèles économiques. Et ce n’est pas terminé ! La révolution numérique n’est pas achevée que l’on voit déjà poindre celles de l’intelligence artificielle et de l’informatique quantique. De ce point de vue, appartenir à un groupe comme le nôtre, qui a investi sur l’IA depuis 2016, est plutôt rassurant. En matière réglementaire, la directive RIS va percuter un peu plus les pratiques et modèles.
"Le double choc numérique et réglementaire a non seulement modifié en profondeur les pratiques mais aussi bouleversé les modèles économiques"
En second lieu, les acteurs eux-mêmes ont beaucoup changé. Trois phénomènes sont assez remarquables : la force des "global players" - qui ne sont plus vus comme des métiers accessoires des activités de réseau, mais comme des acteurs performants et experts – le fort développement des family offices, la concentration majeure des cabinets de CGP formant des groupes aujourd’hui importants, et l’existence de petites entités souvent très expertes, très spécialisées qui adressent des besoins spécifiques.
Le nombre des UHNWI s’est, quant à lui, fortement accru sous l’effet de divers facteurs qu’il serait trop long d’expliquer ici. Je ne suis pas certain que le monde de la banque privée se soit complètement organisé face à cet accroissement. Et c’est parfaitement compréhensible : à l’heure où la réglementation pousse à une certaine uniformisation, il n’est pas simple de faire du sur-mesure. Je vois là l’une des raisons, parmi d’autres, au fort développement des family offices. D’ailleurs l’un des enjeux pour eux comme pour nous consiste à trouver la voie d’une collaboration fructueuse pour nos clients communs plutôt que celle d’une opposition dogmatique. Nous y travaillons activement.
Quels sont vos projets à moyen terme ?
Notre première ambition est de continuer à servir tous nos clients, le mieux possible, en restant innovants, compétents et disponibles. Pour ce faire, nous allons poursuivre notre segmentation en consolidant notre activité wealth management, en accroissant notre accompagnement des jeunes générations – via le Certificat Jeunes Dirigeants en partenariat avec Audencia ou l’Académie Nouvelle Génération pour les plus jeunes – et des startupers. Nous avons également comme ambition d’atteindre la transformation numérique totale de nos opérations, et enfin de passer au filtre de l’ESG l’intégralité de nos activités et de nos offres.
CIC Banque Privée fête ses 20 ans cette année : loin de nous satisfaire du chemin parcouru, nous nous sommes fixé comme ambition d’atteindre les 50 milliards d’encours gérés pour notre quart de siècle. L’activité wealth management y contribuera pleinement. Et nous le ferons en étant animés des valeurs de Crédit Mutuel Alliance Fédérale, notre Groupe.