Groupe Cyrus et Maison Herez fusionnent pour créer un poids lourd de la gestion privée et de la gestion de fortune, avoisinant les 17 milliards d’euros. En négociations exclusives, Meyer Azogui et Patrick Ganansia ont partagé les détails de cette opération inédite lors d’un point presse.
Cyrus et Herez ne font plus qu’un
Jeudi 7 décembre 2023, 14h00. Paris. C’est une journée grise. Six degrés Celsius affichés par l’iPhone 13 (un journaliste ne pouvant raisonnablement détenir la dernière version), un ressenti de 2 degrés, 80 % d’humidité, légère brise sud-est de 17 km/h, et, miraculeusement, un indice UV de 1. Les transports en rade. C’est à pied qu’il faut se frayer un chemin, en plein centre de la capitale, pour atteindre le QG du groupe Cyrus. Il est tentant de bifurquer vers Uniqlo afin de mettre la main sur les dernières bonnes affaires et passer l’hiver au chaud mais le devoir ne le permet pas. Meyer Azogui et Patrick Ganansia attendent une poignée de médias triés sur le volet afin de leur expliquer le pourquoi du comment du rapprochement de leur destin.
Dehors, les gens se pressent aux Galeries pour finaliser – ou amorcer, en retard et à grand-hâte – leurs achats de Noël, sans se douter qu’une machination d’une ampleur colossale se trame à quelques mètres au-dessus de leur tête.
Le bon moment
Partageant la même philosophie de la gestion privée, en plus du même boulevard, les deux hommes réaffirment cette "évidence industrielle" de créer un acteur fort du patrimoine à côté des banques. Bien qu’ils se côtoient depuis plus de quinze ans, les présidents des groupes Cyrus et Herez ont profité de cette fin d’année 2023 pour concrétiser une idée qui leur trottait dans la tête depuis quelque temps. Aujourd’hui les planètes sont alignées, les ambitions convergentes, le calendrier opportun. Dès lors, une aventure commune peut s’envisager sereinement.
Un ensemble imposant
Avec un encours total de 16,7 milliards d’euros, 150 millions d’euros de chiffre d’affaires combiné et plus de 500 collaborateurs, l’union de Cyrus et Herez aura l’ambition de peser dans le paysage de la gestion de fortune, notamment face aux banques privées.
D’un point de vue actionnarial, 20 % de l’ensemble seront dans les mains du fonds Bridgepoint, 7 % du côté du partenaire historique d’Amplegest et, surtout, 73 % pour les collaborateurs du nouveau groupe. Cette répartition capitalistique, ainsi que le schéma de co-présidence entre Meyer Azogui et Patrick Ganansia, permettront aux deux compères de "grandir tout en restant maîtres à bord" . Le fonds Ardian accompagnera le financement de l’opération tandis que Florac, actionnaire minoritaire de Maison Herez à hauteur de 23 % depuis juillet 2020, profitera de l’opération pour sortir avec, on s’en doute, une belle plus-value.
Sur le plan organisationnel, les sociétés de gestion de Herez (Fourpoints IM) et de Cyrus (Amplegest) sont vouées à fusionner, en gardant le nom d’Amplegest. D’autres synergies seront probablement à l’ordre du jour, comme le rapprochement des family offices Canopée FO (Amplegest) et Imani & You (Herez). Si l’on considère en plus Octo AM (gérant obligataire), Eternam (gestion immobilière) et Altixia REIM (SCPI), cela commence à "avoir de la gueule".
Des défis, un désir
Même si "la taille n’est pas une fin en soi", les volumes générés permettront d’accéder plus facilement à certaines offres, de les sécuriser, le tout dans l’intérêt des clients. Car la proximité est le maître-mot pour les protagonistes, l’enjeu du rapprochement étant d’"industrialiser tout sauf la relation client". Ne pas perdre en agilité dans ce contexte d’assemblage et de croissance constituera par ailleurs un réel point de vigilance. Il leur faudra également veiller à "garder les collaborateurs, avoir le moins de turnover possible". En cela, la part élevée du capital détenue par les employés du groupe s’avère indispensable. Et au cœur du projet, l’envie de créer une marque attractive, reconnue, pouvant tenir tête aux banques privées et se faire une place dans le crâne de potentiels clients fortunés.
En ce qui concerne l’horizon, les deux hommes souhaitent développer le maillage territorial en couvrant les zones les plus pertinentes. Quant à la croissance externe, elle sera habilement utilisée pour renforcer des expertises et monter en compétence, notamment sur le non-côté qui, en outre, nécessite des volumes élevés pour obtenir les meilleurs véhicules d’investissement.
Il est 15h00, Paris. Se mouche. Il souffle une brise froide. Les illuminations des Galeries réchauffent le cœur des consommateurs qui viennent d’alléger leur compte bancaire de quelques centaines d’euros.
Pour l’heure, souhaitons bonne chance à Cyrus Maison Herez.
Marc Munier